Pour Oliver Stone, filmer tient de l’argumentation critique et subjective. Faire un film, c’est énoncer un discours contextuel et formel. Le réalisateur ancre ses productions à l’intérieur du réel, régule son espace-temps à partir des limites historiques explorées par son sujet. Dès ses premiers scénarios, Stone prenait bien soin de déterminer socio-historiquement ses personnages. C’est la crise cubaine dans Scarface (Brian De Palma, 1983), les rapports de l’Occident et de l’Orient dans Midnight Express (Alan Parker, 1978), ou encore la problématique ethnique dans L’Année du dragon (Michael Cimino, 1985). Passé derrière la caméra, la chose se précise encore pour Stone. La guerre civile du Salvador (Salvador, 1986), la guerre du Vietnam (Platoon ,1986 ; Né un 4 juillet, 1989 ; Entre Ciel et Terre, 1993), le 11 septembre (World Trade Center, 2006), la réalité souvent douloureuse et malhonnête du sport de haut niveau (L’Enfer du dimanche, 1999), du monde financier (Wall Street, 1987 ; Wall Street : L’Argent ne dort jamais, 2010) , ou de l’économie souterraine (Savages, 2012) sont au coeur de ses récits. Ce penchant documentaire – qui se concrétisera tout à fait avec la production télévisuelle d’Une autre histoire de l’Amérique (2013) – devait logiquement se tourner vers la forme du biopic. Celle-ci servira l’enquête politique entreprise par le cinéaste. Il y eut Jim Marrs (JFK, 1991), Richard Nixon (Nixon, 1995), George W. Bush (W. : L’improbable Président, 2008) et aujourd’hui Snowden.