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La communion – Ange ou démon ?

La communion est le troisième film de fiction réalisé par Jan Komasa mais son premier à être distribué en France. Ses deux aînés, La chambre des suicidés (2011) et Insurrection (2014), ont été très remarqués notamment en Pologne, pays du cinéaste. Le scénario du film est inspiré d’une histoire aussi vraie qu’étonnante : un jeune prisonnier se fait passer pour un prêtre. Le parcours tracé, les lieux visités et les personnages secondaires ont été repris en l’état par le scénariste Mateusz Pacewicz au fil d’une narration à la construction rigoureuse.

Daniel, 20 ans, se découvre une vocation spirituelle dans un centre de détention pour la jeunesse mais le crime qu’il a commis l’empêche d’accéder aux études de séminariste. Envoyé dans une petite ville pour travailler dans un atelier de menuiserie, il se fait passer pour un prêtre et prend la tête de la paroisse. L’arrivée du jeune et charismatique prédicateur bouscule alors cette petite communauté conservatrice.

Jan Komasa met en scène un jeune délinquant en cours de réinsertion, Daniel interprété par Bartosz Bielenia, dont la spiritualité découverte en centre de redressement auprès de l’aumônier de la prison (Lukasz Simlat) le voue à rentrer dans les ordres. Ce vœu a vocation à rester pieu car dissolu dans le passé en désordre du jeune homme. La communion sonne comme une œuvre sur la foi, la religion et la rédemption. Autant de thèmes lourds qui jouissent ici d’une puissance très singulière sachant que le film et son auteur d’une Pologne où le christianisme occupe une grande place.

La rédemption portée est double. Il y a celle menée en solitaire par Daniel et celle collective, plus identificatrice, de « ses » paroissiens endeuillés car récemment frappés par un drame. Ce double fil narratif complété d’une romance accessoire accouche d’un film plein. La communion a connu un gros succès public dans les salles polonaises et une belle carrière dans les festivals. Il fut notamment présenté à la Mostra de Venise et a été logiquement porteur de la bannière polonaise pour l’Oscar 2020 du meilleur film en langue étrangère.

Caractéristique devenue rare, la grande originalité du scénario composé par Mateusz Pacewicz et inspiré d’une histoire vraie est soutenue par une narration certes un peu programmatique mais sans faiblesse. La communion file à bonne allure au rythme de changements de tons que Komasa maîtrise indéniablement. Ainsi, le spectateur est surpris tant par l’histoire insolite racontée que par les scènes animées d’une violence crue, soudaine et explicite. Ces séquences participent à instaurer une ambiance étrange et perturbante dans un impossible équilibre entre religiosité et profanation, pensées et actions.

Le dynamisme de la narration n’a donc d’égal que celui d’une mise en scène recherchée. Le réalisateur multiplie et décline de nombreux motifs religieux jusque sur le corps non pas du Christ mais de Daniel. Le titre original du film traduit du polonais renvoie d’ailleurs à la locution Corpus Christi. La tragédie catholique filmée est traversée de bout en bout par une tension sourde et parfois dérangeante. Depuis une scène liminaire à la douleur toute masculine jusqu’à un final explosif, Komasa démontre sa faculté à varier et ainsi dynamiser sa mise en scène. Celle-ci se révèle rigoureuse, précise et posée dans un premier temps avant de progressivement se montrer, caméra à l’épaule, plus heurtée et violente donc plus percutante.

Dans son rôle d’imposteur car l’habit ne fait pas le moine, Bielenia, jeune acteur polonais au regard bleu halluciné, livre une remarquable interprétation. Il semble plus judicieux et exact d’évoquer ici une très étonnante incarnation entre ange et démon imposée par un rôle physique peu orthodoxe. De façon plus globale, c’est bien tout le casting du film qui mérite d’être félicité. Au-delà de ses talents de metteur en scène, Komasa semble aussi doué de belles qualités de directeur d’acteur.

 

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