Mis à jour le 10 mars, 2018
Portrait de Steven Patrick Morrissey et le début de sa vie à Manchester dans les années 70 avant qu’il ne devienne le chanteur emblématique du groupe The Smiths.
England is mine est le titre retenu pour distribuer le film en France, quand le titre originel, outre-manche, était Steven before Morrissey.
Comme si souvent (le dernier exemple qui nous vienne à l’esprit est « A beautiful day« ), ce changement de titre est de notre avis une erreur. Steven before Morrissey est autrement plus évocateur, symbolique mais aussi alléchant. Ce titre parle de ce qu’est le film, au contraire du titre français qui ne raconte rien, qui sème juste la confusion, puisqu’on vient à le confondre avec un autre film britannique de plutôt bonne facture, This is england. Il y a bien une filiation entre les deux films, mais elle est lointaine, tirée par les cheveux.
England is mine, puisqu’il s’agit donc de le nommer ainsi, dresse le portrait d’un jeune homme en devenir, un certain Steven, Morrissey de son nom, qui plus tard deviendra une des icônes de la pop anglaise que ce soit avec son groupe « The smiths » ou en solo.
Le portrait est très valable en ce qu’il vise des à côtés, des petites choses qui ne sont pas forcément sues sur ce grand artiste, en tout cas en France. Nous sommes aux antipodes d’une success story, d’un biopic, d’un cloclo par exemple- on peut parler de contre biopic même.
On songe parfois à un rapprochement avec un autre film britannique touchant, Frank que nous avions également découvert au festival du film britannique 2014.
La tranche de vie que le réalisateur Mark Gill choisit de nous raconter n’est pas forcément reluisante: le succès n’est pas au rendez-vous pour le jeune homme, que ce soit le succès musical, ou le succès dans ses relations aux autres.
Steven est un garçon fragile, plutôt maladif, qui se cherche. Il n’est pas nécessairement doué, plutôt rêveur, sa qualité première n’est pas d’avoir les pieds sur terre. Le jeune homme a des envies d’ailleurs, de quitter sa morne existence, de se cultiver notamment.
Une rencontre sera décisive pour lui, une jeune femme, plutôt punkette, qui le prend en sympathie et lui permet de se sociabiliser, d’accéder à un monde qui laisse entrevoir quelques possibilités; mais son quotidien reste irrémédiablement morne.
Steven est angoissé, maladroit, très peu dans le coup. La force du film tient en ses ellipses d’une part, mais aussi au regard porté sur le jeune homme. A l’instar de Born to be blue, nous ressentons une bienveillance, nous remarquons surtout que l’auteur parle d’un artiste qu’il connaît sur les bouts des ongles. Ostensiblement, il cherche à retranscrire à l’écran une face méconnue de sa personnalité.
L’entreprise, étrangement -quant on compare par exemple au Coluche de Decaunes– , tient de l’hommage sincère; en décrivant un personnage à parfaire, Mark Gill nous le rend attendrissant.
Evidemment, le succès devra passer par une suite d’événements, par une transformation à opérer, par un apprentissage. Evidemment, la personnalité intrinsèque de Steven Morrissey expliquera son parcours, ses choix. En nous décrivant le jeune homme, le réalisateur nous permet de mieux comprendre l’artiste, son univers – romantique désabusé -, mais aussi sa trajectoire. Car puisse-t-on s’améliorer, s’exercer, vient toujours dans l’existence un moment où le naturel retrouve sa place. La gloire devra nécessairement laisser la place à une nouvelle période de doute, voilà ce que l’on saisit au travers du regard, au travers des pensées du jeune homme, par ailleurs remarquablement interprété – le jeune acteur Jack Lowden, aperçu notamment dans Dunkerque ou encore la série de la BBC Guerre et Paix récemment diffusée sur Arte, est très expressif.
Ces interpolations, nous les faisons alors même que, comme nous le disions précédemment, ces périodes ne sont pas du tout couvertes dans ce que prévoit le scénario; l’art de l’ellipse donc !
La scène finale du film pourra derechef étonner. Elle en dit bien plus long qu’il n’y paraît, nous vous laisserons la découvrir. Pour en revenir aux autres qualités du film, citons bien évidemment la bande son, mais aussi la photographie soignée, dont les quelques illustrations de cet article attestent.
Nous conseillons Steven avant Morrissey, pardon England is mine, à tout amateur de l’artiste. A contrario, pour qui ne le connaît pas, nous conseillons d’abord de plonger dans son univers musical, puis dans un second temps d’aller découvrir le film.
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