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#Venise2022 – Notre Journal critique de la compétition

En compétition #Venezia79

Vous retrouverez dans les lignes qui suivent notre journal critique de la compétition de La Mostra de Venise 2021. La note maximale que l’on peut donner est ***** correspondant à nos yeux à un chef d’oeuvre, note que l’on donne très rarement, la note la plus basse est – quand on a trouvé le film très mauvais.


IL SIGNORE DELLE FORMICHE de Gianni Amelio
avec Luigi Lo Cascio, Elio Germano, Leonardo Maltese, Sara Serraiocco / Italie / 134′

À la fin des années soixante, un procès a eu lieu à Rome et a fait sensation. Le dramaturge et poète Aldo Braibanti est condamné à neuf ans de prison, reconnu coupable de plagio. C’est-à-dire d’avoir soumis une autre personne, physiquement et psychologiquement, à sa propre volonté. En l’occurrence, un élève et ami à peine majeur. La famille de l’adolescent le fit interner dans un hôpital psychiatrique et le soumit à une série d’électrochocs dévastateurs pour le « guérir » de cette influence « diabolique ». Quelques années plus tard, le crime de plagio a été supprimé du code pénal italien. Mais à ce moment-là, il avait été utilisé pour incriminer les « inadaptés » de toutes sortes, les hors-la-loi de la norme. S’inspirant de faits réels, le film raconte une histoire à travers un chœur de voix. Outre l’accusé, sa famille et ses amis, accusateurs et partisans prennent forme sur fond d’une opinion publique largement distraite ou indifférente. Seul un journaliste se charge de reconstituer la vérité, en faisant face à la suspicion et à la censure.

Notre avis: **.

Le film s’attaque de manière plutôt frontale à l’homophobie en Italie dans les années 70, et les quelques sifflets entendus en projection presse montrent si besoin en était que la cause, certes bien plus tendance aujourd’hui, nécessite encore et toujours d’être relayée et mise à l’écran. Sur la forme, le film démarre maladroitement, accumulant certaines convenances et appuyant un peu trop le trait quant aux émotions des personnages, au niveau du jeu ou de la mise en scène. Cette première partie, nécessaire pour introduire son sujet, témoigner de la relation qui unit les deux protagonistes principaux, laisse ensuite place à une proposition conceptuelle autrement plus intéressante et habile. En nous proposant un procès fictif, en inversant (par exemple en comparaison avec #Argentina) le rôle généralement dévolu aux procès dans les films (faire jaillir la vérité, mettre en avant les qualités de certains hommes/certaines femmes intègres, leur habilité, leur acharnement, en faire ressortir leur héroïsme et dans la mesure du possible (et du divertissant) les faire triompher), le film délivre alors un message, certes direct et toujours appuyé, mais qui fait appel à l’intelligence du spectateur, devant la farce que peut être ce procès. Malin à ce niveau, nous regrettons ceci dit que le film ne cherche pas à aller plus loin cinématographiquement parlant, qu’il ne refuse pas également certains clichés (par exemple l’antagonisme entre la culture et l’homophobie, et l’association faite avec le football – on peut être cultivé, hétéronormé, aimer le football et ne pas être homophobe pour autant :-)).


LA BALEINE de Darren Aronofsky
avec Brendan Fraser, Sadie Sink, Ty Simpkins, Hong Chau, Samantha Morton / USA / 117′

Un professeur d’anglais reclus, souffrant d’obésité sévère, tente de renouer avec sa fille adolescente, dont il s’est séparé, pour une dernière chance de rédemption.


WHITE NOISE de Noah Baumbach
avec Adam Driver, Greta Gerwig, Don Cheadle, Raffey Cassidy, Sam Nivola, May Nivola, Jodie Turner-Smith, André L. Benjamin, Lars Eidinger / USA / 136′

À la fois hilarant et horrifiant, lyrique et absurde, ordinaire et apocalyptique, White Noise met en scène les tentatives d’une famille américaine contemporaine de gérer les conflits banals de la vie quotidienne tout en s’attaquant aux mystères universels de l’amour, de la mort et de la possibilité du bonheur dans un monde incertain.

Notre avis: **(*)

Le synopsis le situe parfaitement. White Noise tente d’intellectualiser des concepts très grands publics, autour du couple, du cinéma américain – les scènes de cascade de voiture, l’enseignement d’un professeur showman – ici Adam Driver campe un professeur qui a bâti sa réputation sur son style théatral et sa connaissance approfondi d’Hitler … Sur fond apocalyptique qui se découvre après une mise en place verbeuse et plutôt pataude, parsemé d’épais nuages de dialogues réflexifs plus pesants que profonds, le film se joue et rend hommage tout à la fois à la dramaturgie américaine et aux films d’actions, en même temps qu’il s’essaye à insérer du quotidien et à interroger le couple comme Noah Baumbach (et Greta Gerwig) ne cessent de le faire dans leur œuvre commune. Mélange détonnant qui ne prend pas totalement, mais offre un divertissement honnête – effectivement le comique s’invite ici ou là, l’hyper chorégraphie du film produit un effet plaisant- à défaut d’un film qui compte (On sent la patte Netflix, la volonté d’unir les contraires, et de proposer plusieurs niveaux de lecture). Un méta-film donc qui souffre, comme souvent dans de pareils cas, de mettre le concept au centre du projet, de faire reposer sur lui la capacité à embarquer le spectateur, et non de le le mettre au service d’un regard sincère et profond. #sociétéduspectacle


L’IMMENSITÀ d’Emanuele Crialese
avec Penélope Cruz, Luana Giuliani, Vincenzo Amato, Patrizio Francioni, Maria Chiara Goretti / Italie, France / 97′

Rome, années 1970 : un monde suspendu entre des quartiers en construction, des émissions de télévision encore en noir et blanc, des acquis sociaux et des modèles familiaux aujourd’hui dépassés.
Clara et Felice viennent d’emménager dans un nouvel appartement. Leur mariage est terminé : ils ne s’aiment plus mais ne peuvent pas se séparer. Seuls leurs enfants, sur lesquels Clara déverse tout son désir de liberté, les maintiennent ensemble. Adriana, l’aînée, vient d’avoir 12 ans et est le témoin le plus attentif des états d’âme de Clara et des tensions croissantes entre ses parents. Adriana rejette son nom et son identité et veut convaincre tout le monde qu’elle est un garçon. Son obstination amène l’équilibre familial déjà fragile à un point de rupture.
Alors que les enfants attendent un signe qui pourrait les guider – une voix d’en haut ou une chanson à la télévision peut-être – tout change autour d’eux et en eux.

Notre avis: *.


Malgré quelques bonnes idées, #limmensitá projeté en compétition à la Mostra de #Venise2022 (#Venezia79), ne trouve jamais sa respiration et son liant. La faute, une fois de plus, à un regard des plus communs … #PenelopeCruz est ici invitée à incarner la femme italienne en quasi fantôme de Sofia Loren. Grossier. La thématique identitaire, la binarité de genre semble occuper le récit sur le même plan que l’autre thématique principale connexe, la soumission d’une femme, les abus de son mari, avec la complicité de son entourage. Le mélange ne fonctionne pas pour la bonne et simple raison que la relation de cause à effet qui s’en perçoit est du plus mauvais goût … Tout comme peut l’être l’un des troubles collatéraux sur l’un des enfants, qui se met à déféquer devant la porte de la chambre conjugal pour signifier son désarroi. Grossier, une fois de plus. Les ficelles narratives, les coutures saillantes, ne nous permettent pas de raccrocher à ce récit qui se développe sans autre but que d’enfoncer la porte ouverte sur ses thématiques, pensées fortes/importantes puisque dans l’air du temps. Les quelques bonnes idées de mise en scène ou scénaristiques, plus ou moins bien réussies, consistant par exemple à convier dans le récit les aspirations à une libération, des références à des images très italiennes, d’hier (en référence par exemple à des frontières sociales et ethnographiques très souvent mis à l’écran par Pasolini ou Scola) ou d’aujourd’hui – là aussi le regard manque de singularité quelque part mais l’idée est bonne- et peut être plus encore la volonté d’enrober le tout dans un univers musical fantasmé – qui fonctionne un peu puis lasse) ne nous permettent pas de raccrocher au tout. Nous gardons ceci dit à l’esprit l’un des rares moments où le film s’aventure du côté de la subtilité, lorsque la femme profondément meurtrie, qui cherche avec ses enfants à se recréer un univers enfantin où la bonne humeur règne, observe non sans cynisme à sa belle mère qu’elle « ne craint pas les fantaisies des enfants, mais se méfie bien davantage des fantaisies des adultes ».


SAINT OMER d’Alice Diop
avec Kayije Kagame, Guslagie Malanda, Valérie Dréville, Aurélia Petit / France / 123′

Tribunal de Saint-Omer. La jeune romancière Rama assiste au procès de Laurence Coly, une jeune femme accusée d’avoir tué sa fille de 15 mois en l’abandonnant à la marée montante sur une plage du nord de la France. Mais au fil du procès, les propos de l’accusée et les témoignages vont ébranler les convictions de Rama et remettre en question notre propre jugement.

Notre avis: ***(*)

Apre et exigeant, le film d’Alice Diop #SaintOmer en compétition à la Mostra de #Venise2022 (#Venezia79) n’est pas à ranger du côté des films aimables, faciles d’accès et souriants (comme peut l’être par exemple le dernier McDonagh). Bien au contraire, il part du principe, pour citer son personnage principal, observatrice et témoin privilégiée d’un procès qui la marque et la saisit en effet miroir, que le spectateur connaisse le mythe de Médée. Il part également du principe que le spectateur saura lire entre les lignes, se faire son propre jugement, et sa propre interprétation de ce qui lui est donné à voir, et plus encore à entendre. Conceptuel par ce jeu de miroir proposé au spectateur qui est appelé à résoudre les différentes énigmes et questions posées, comme peut le faire notre témoin, en proie elle même avec ses propres questionnements, doutes, et qui se reconnaît en tant que femme intelligente, éduquée, cultivée dans le parcours et les épreuves auxquelles la jeune femme accusée a du faire preuve, le film a comme singularité, outre une forme plutôt hanekienne qui vise à faire ressortir l’essentiel, d’être porté par une réflexion intellectuellement très référencée sur un sujet sur lequel le spectateur peut facilement manquer de points de repères. Il prend aussi le parti pris de poser plus de questions qu’il n’apporte réellement de réponses, et de ne pas tellement faire jouer à la justice le rôle que l’on peut attendre d’elle, celle de dévoiler l’entière vérité. Nous serons ainsi troublés de repartir du procès peut être avec plus de questions que de réponses. A noter qu’en sélection, le procès trouve 3 usages très différents. Dans Argentina, il occupe une fonction divertissante et héroïque pour amener le spectateur à se raccrocher à la justice et s’émerveiller de sa fonction rendue, dans il signore delle formische au contraire, il est donné à voir une justice dysfonctionnelle qui mélange les apriori et la loi et sort de ses compétences et missions, et ici, le procès pose un dilemme, n’éclaircit pas la situation de départ, il se fait le véhicule d’un mythe, d’un problème sociétal profond, d’une interrogation psychiatrique, doublée d’un message politique militant (féminisme, intégration).


BLONDE d’Andrew Dominik
avec Ana de Armas, Adrien Brody, Bobby Cannavale, Xavier Samuel, Julianne Nicholson, Lily Fisher / USA / 166′

Basé sur le roman à succès de Joyce Carol Oates, Blonde réimagine avec audace la vie de l’une des icônes les plus durables d’Hollywood, Marilyn Monroe. Depuis son enfance instable sous le nom de Norma Jeane jusqu’à son ascension vers la célébrité et ses relations amoureuses, Blonde brouille les pistes entre réalité et fiction pour explorer le fossé grandissant entre sa vie publique et sa vie privée.

Notre avis: **

#Blonde d’#AndrewDominik s’est fait très attendre. Annoncé un peu partout en sélection ces dernières années, le film a finalement vu le jour, et est en compétition à la Mostra de #Venise2022 #Venezia79. Il embrasse l’ambition, un peu folle, d’adapter à l’écran le livre éponyme, roman de référence sur Marilyn Monroe. Ce projet lui aura pris de nombreuses années, notamment pour réunir les fonds nécessaires. Un peu comme Luhrman avec Elvis, Dominik cherche, à travers ce sujet en or massif, non pas à s’effacer, mais au contraire à s’affirmer en tant qu’artiste. Comme Luhrman, il se fait plaisir, et cherche à procurer au spectateur un effet tourbillon. D’emblée, dans une ouverture un rien manichéenne, Dominik dévoile toute l’essence de son projet. Devant nos yeux, son personnage principal, la petite fille Norma Jean Baker, pleine d’innocence et de bon sens, gentille et attachante. Dominik s’attarde alors sur ce qui suivra la jeune fille dans toute son existence, son rapport à sa mère, son absence de père. Plutôt que de privilégier le biopic, Dominik cherche son propre langage narratif et formel. D’un côté, il prend le soin de ne pas mettre à l’écran les faits divers les plus connus, ou même la success story, son sujet n’est pas tant Marilyn que Norma Jean, la femme enfant, traumatisée, et ses tourments. En lieu et place, il développe certaines bribes de la biographie, en y proposant sa propre lecture mais aussi parfois une forme de réécriture qui peut surprendre. De l’autre, sur le plan visuel, il s’essaye à plusieurs assemblages, à plusieurs genres, en tentant le savant dosage entre clips, images subliminales, travaux sur la couleur, la déformation du champs visuel. A de rares occasions, Dominik s’essaye à quelques expérimentations sonores, l’habillage global du film étant, à l’américaine, très ampoulé; encore une fois les violons sont de sortie, même si ce ne sont pas nécessairement les mêmes que pour Argentina. Ces toutes relatives expérimentations (on reconnait la façon de filmer de Dominik) ne produisent pas nécessairement l’effet recherché, de sublimer un récit en or massif. Sur la forme, l’abondance des clips ont tendance à nuire à la narration plus qu’à ne la raviver, l’alternance entre le noir et blanc et les passages en couleur ne semblent pas obéir à une ligne directrice formelle ou narrative forte, bien plus, il semblerait qu’il s’agisse plus là d’une forme de cache misère…
Si Dominik parvient à éviter l’écueil de la surdramatisation, ou de l’effacement total vis à vis du sujet, il tombe cependant dans certains travers liés à ses choix artistiques, son processus de création, mais aussi ses propres limites. Ainsi, à trop vouloir y mettre sa patte, certains passages semblent terriblement manquer de vérité. La fantasmagorie du réalisateur est de tous les plans,
elle n’offre aucune objectivité. Derrière le mythe Marilyn, se cachait également une industrie Hollywood où tout était permis, et la sexualisation de l’icone, sa fin tragique, son mode de vie, auront maintes fois défrayé la chronique. Dominik certes évite de colporter (ou de s’intéresser) aux ragots/ »gossip », d’éplucher les poubelles, mais il ne peut s’empêcher de rajouter du souffre, même à très petite dose, de façon totalement stérile. Ainsi, la seule apparition à l’écran de Kennedy le verra demander à Marilyn de la main, une « blowjob », sans même avoir la moindre communication. Plus que des respirations, ou des passages merveilleux, les rêves ou cauchemars, les flashback, les accélérations clipesques, ne présentent aucune subtilité ou mystère, pire, ils génèrent de l’insistance. Certes les tourments de Norma Jean, ses traumatismes, ses sensations constituent la substantifique moelle qu’il nous invité à ausculter, sa caméra se faisant scalpel; mais hélas, cela se fait au dépend d’une finesse d’analyse, d’un regard psychologique qui permettrait d’éclairer ses troubles ou en tout cas de les interroger bien davantage que ne peut le faire Blonde ou tout semble causalité simpliste… Nous passons résolument à côté de la complexité du personnage, tout juste nous est-il rappeler le jeu ambivalent avec laquelle Norma Jean devait composer, entre la petite fille blessée, et Marilyn la star adulée, désirée, hypermédiatisée, objet d’exploitation et de vices. Quelle était donc l’intention véritable de Dominik se demande-t-on alors ? Certes, il prend soin de ne pas esquinter l’icône, de ne pas expliquer le phénomène d’iconisation, certes il se fait plaisir artistiquement parlant en cherchant à traduire à l’image des sensations qu’il imagine vécues, certes il excuse Norma Jean, mais quid du portrait en tant que tel. Portrait d’une femme, d’une artiste, d’un pays, tout comme nous le formulions pour Elvis, la mine était pourtant bien là … Reste que le showcase Blonde n’est pas foncièrement insupportable, qu’il maintient en éveil, et garde un certain équilibre; nul naufrage donc, 2h44 de divertissement acceptable.


TÁR de Todd Field
avec Cate Blanchett, Noémie Merlant, Nina Hoss, Sophie Kauer, Julian Glover, Allan Corduner, Mark Strong / USA / 158′

Situé dans le monde international de la musique classique, TÁR est centré sur la toute première femme chef d’orchestre d’un grand orchestre allemand.

Notre avis: ***

Le film surprend par son intensité et les détours qu’il propose. Sa première partie laisse deviner une inspiration très fincherienne, et s’avère utile à brouiller les pistes (plus qu’à captiver réellement, par trop de fausse technicité). Un portrait se dessine et s’invite à nous, porté par l’excellence de l’interprétation de Blanchett qui semble reprendre le costume de Carol … Mais si le regard semble de prime abord admiratif comme si souvent dans les biopics, il s’attache petit à petit au hors champ, à l’intime, à la face double, et pour une fois, sombre d’une héroïne (comme cela s’est fait plus souvent pour les héros masculins). Le récit développe alors une sorte de thriller alenti, troublant, et se joue de petites indications pour mieux saisir le spectateur, sans jamais livrer tout son sens. Particulier, malin et plutôt moderne dans son regard -même si on peut lui reprocher une forme de moralisme affirmé, le film parvient, une fois passée sa première heure, à interroger et captiver .


LOVE LIFE de Kôji Fukada
avec Fumino Kimura, Kento Nagayama, Tetta Shimada, Atom Sunada, Hirona Yamazaki, Misuzu Kanno, Tomorowo Taguchi / Japon, France / 123′

Taeko et son mari Jiro mènent une existence paisible avec leur jeune fils Keita, lorsqu’un accident tragique ramène dans sa vie le père de l’enfant, Park, perdu depuis longtemps.
Pour surmonter la douleur et la culpabilité, Taeko se lance dans l’aide à cet homme sourd et sans abri.

Notre avis: ****.

Love Life de Fukada bénéficie d’une remarquable structure de récit et d’une pluralité de thématiques qui s’enchevêtrent et s’interfèrent les unes les autres, avec une grande méticulosité. D’un tire larme plutôt malaisant et appuyé, où les choses peuvent sembler simples en apparence, prenant ceci-dit soin de s’attarder sur des faits et gestes en apparence anodins qui en disent long sur les identités, les relations des personnages entre eux, mais aussi sur le rapport des japonais aux coréens (vu comme des assistés qui volent l’argent des japonais) le film glisse parfois progressivement , parfois, en parfaite et inattendue rupture, vers des relations autrement plus complexes, où le passé de chacun des personnages ressurgit, où le deuil transforme chacun des personnages de façon inattendue, où les revirements de situation se font légions, toujours avec un très grand soin du détail qui permet de les intégrer pièce à pièce pour former un tout tout à la fois rocambolesque, saisissant et, de manière ambivalente, criant de vérité. La magie de l’écriture et de la mise en scène résident ici dans cette capacité à ne rien laisser aux hasard, à symboliser ce qui peut l’être, à laisser entendre, glisser un indice ici ou là, dans un regard, un objet, à interroger la communication – le langage des signes trouvent ici une utilisation et une métaphore sublime – pour donner à voir au spectateur une histoire simple, linéaire mais hautement ramifiée, et surtout, donnant à réfléchir en permanence. Le regard du cinéaste est omniprésent: philosophique, accusateur, psychologique, ethnologique aussi. Une excellent surprise pour nous qui n’avions pas nécessairement accroché à d’autres réalisations récentes très admirées mais qui nous semblaient bien en retrait par rapport à ce Love Life si méticuleusement pensé.


BARDO, FALSA CRÓNICA DE UNAS CUANTAS VERDADES d’ Alejandro G. Iñárritu
avec Daniel Giménez Cacho, Griselda Siciliani, Ximena Lamadrid, Iker Sanchez Solano, Andrés Almeida, Francisco Rubio / Mexique / 174′

BARDO, Falsa crónica de unas cuantas verdades est une expérience épique, visuellement époustouflante et immersive qui a pour cadre le voyage intime et émouvant de Silverio, un journaliste et documentariste mexicain renommé vivant à Los Angeles, qui, après avoir été nommé lauréat d’un prestigieux prix international, est contraint de retourner dans son pays natal, sans savoir que ce simple voyage va le pousser à une limite existentielle.
La folie de ses souvenirs et de ses peurs a décidé de percer le présent, emplissant son quotidien d’un sentiment d’égarement et d’émerveillement. Avec émotion et un rire abondant, Silverio aborde des questions à la fois universelles et intimes sur l’identité, la réussite, la mortalité, l’histoire du Mexique et les liens familiaux profondément affectifs qu’il partage avec sa femme et ses enfants. En fait, ce que cela signifie d’être humain en ces temps très particuliers.

Notre note: *

#Venezia79#Venise2022 #Inarritu avec BARDO, FALSA CRÓNICA DE UNAS CUANTAS VERDADES se fourvoie. Il pensait probablement tenter le chef d’œuvre, se servir de sa maestria visuelle pour épater la galerie, d’autant que le récit multiplie les concepts oniriques si chers à Bunuel, les mises en abîmes, les symboles, d’autant qu’il brasse large en termes d’ambitions thématiques (notre monde, le Mexique, son héros, son rapport familial, …) mais il a tout simplement oublié de faire un film doté d’un véritable regard et propos. Seule la prétention est ici apparente, les intentions artistiques volent en éclats par manque de finesse, de nuances, de parcimonie. A l’instar de Mallick qui basculait totalement dans sa propre métaphysique (bien décevante au final) dans the Tree of Life, Inarritu décide lui aussi de mettre ce que l’on devine en général en second plan de ces films (une note mystique) au premier plan et pour toute matière. Alors certes, il ausculte le rapport à la mort, la falsification assumée de l’histoire, mais il se répète, multiplie les poncifs, et omet de prendre en compte son spectateur.


ATHENA de Romain Gavras
avec Dali Benssalah, Sami Slimane, Anthony Bajon, Ouassini Embarek, Alexis Manenti / France / 97′

Après la mort de son plus jeune frère à la suite d’une prétendue altercation avec la police, Abdel est rappelé du front pour retrouver sa famille déchirée. Pris entre le désir de vengeance de son jeune frère Karim et les agissements criminels de son frère aîné Moktar, il s’efforce de calmer les tensions croissantes. Alors que la situation s’aggrave, leur communauté Athena se transforme en forteresse assiégée, devenant le théâtre de tragédies pour la famille et au-delà…

Notre avis: *.

Athena de #RomainGavras fait partie de ces quelques films qui donnent des envies aux critiques de se transformer en juré de patinage artistique, et de se contenter d’une évaluation plutôt que d’une analyse. Techniquement, assurément très fort, la caméra en mouvement permanent, l’enchaînement des plans séquence, les transitions explosives, les feux d’artifices permanents, les chorégraphies, Gavras n’a pas grand chose à envier aux amateurs du style, de Noé à Mendes en passant par Nemès. On le savait déjà. Il nous restait donc à juger du fond, mais aussi de la forme, sur le plan artistique cette fois-ci. Notre jour viendra, sous ses accents révolutionnaires, et un rien potache, portait une réflexion, un regard; certes moins affiné que celui de son père, mais pas inintéressant. Le monde est à toi était bien plus à ranger du côté de la gaudriole, ou dans celui de l’hommage à un genre précis, la comédie de braquage. Avec Athena, hélàs, très peu à sauver. Les intentions artistiques sont quasi nulles, la dramaturgie hyper appuyée, à la Netflix, sans aucune finesse, la réflexion portée sème le doute, Gavras idéalise-t-il la révolution, l’appelle-t-il, la craint-il, ou la constate-t-il ? Il se fait en tout cas le relai de médias étrangers qui dépeignent la France comme un territoire hostile où la guerre civile a déjà commencé. Il pousse le curseur un peu plus loin. A quelle fin ? Appel ou alerte ? Ce trouble passé, il ne reste hélàs qu’un continuum que les premières images, ébloussiantes certes, avaient par trop annoncées. L’action, uniquement l’action, la répétition de l’action, et la lassitude qui très vite s’invite.


BONES AND ALL de Luca Guadagnino
avec Taylor Russell, Timothée Chalamet, Mark Rylance, André Holland, Chloë Sevigny, Jessica Harper, David Gordon Green, Michael Stuhlbarg, Jake Horowitz / USA / 130′

Le premier amour frappe Maren, une jeune femme qui apprend à survivre en marge de la société, et Lee, un vagabond intense et privé de ses droits, alors qu’ils se rencontrent et s’unissent pour une odyssée de mille kilomètres qui les mène à travers les routes secondaires, les passages cachés et les trappes de l’Amérique de Ronald Reagan. Mais malgré tous leurs efforts, tous les chemins mènent à leur passé terrifiant et à une ultime confrontation qui déterminera si leur amour peut survivre à leur altérité.

Notre avis : **.

#BonesAndAll de Luca Guadagnino, une cavale amoureuse et identitaire sur fond de cannibalisme, allégorie de la maladie psychiatrique. Plutôt bien construit, divertissant à défaut d’être plastiquement merveilleux ou foncièrement provocant. Un mélange entre Grave, un film d’Oliver Stone et Thelma et Louise.


LA FILLE ÉTERNELLE de Joanna Hogg
avec Tilda Swinton, Joseph Mydell, Carly-Sophia Davies / UK, USA / 96′

Une artiste et sa mère âgée sont confrontées à des secrets enfouis depuis longtemps lorsqu’elles retournent dans une ancienne maison familiale, devenue un hôtel hanté par son mystérieux passé.

Notre avis: **.

Joanna Hogg s’est fait un nom avec The Souvenir qui a marqué les esprits par sa construction complexe, sa tonalité très réaliste mais aussi troublée, où les sensations occupent une part importante du récit, bien moins linéaire que le temps long, autre marque de fabrique, ne laisse penser. La réalisatrice aime user de concept, et s’affirmer dans une forme qui emprunte au littéraire. Comme beaucoup, nous attendions donc avec impatience de pouvoir découvrir #TheEternalDaughter à la Mostra de #Venise2022 (#Venezia79). Le film repose sur son concept et son actrice principale Tilda Swinton. Il impose d’emblée son atmosphère, à la Edgar Allan Poe dirons-nous, et très vite nous pensons au mythe du fantôme. Le temps de narration s’attarde sur des gestes précis, des décors précis, qui narrent tout autant que les dialogues. Joanna Hogg au delà des concepts cherche à proposer une forme étrange, avec laquelle nous pourrions rentrer en empathie. Les symboles tiennent une part importante. Si le film fonctionne plutôt bien, s’il produit son petit effet, il nous semble cependant moins ample que The Souvenir, et plus proche d’un exercice de style que d’un véritable accomplissement.


SHAB, DAKHELI, DIVAR (AU-DELÀ DU MUR) de Vahid Jalilvand
avec Navid Mohammadzadeh, Diana Habibi, Amir Aghaee, Saeed Dakh, Danial Kheirikhah, Alireza Kamali / Iran / 126′

Ali, un aveugle, tente de se suicider lorsqu’il est interrompu par le concierge de son immeuble. Il est informé que la police est à la recherche d’une femme qui s’est échappée et s’est cachée quelque part dans l’immeuble. Petit à petit, Ali découvre que la femme fugitive, Leila, se trouve dans son appartement. Après avoir participé à une manifestation ouvrière qui a conduit au chaos, elle est désemparée au sujet de son fils de quatre ans qui a été perdu lorsqu’elle a été emmenée dans un fourgon de police. Peu à peu, Ali s’attache émotionnellement à elle. Désireux de fuir la réalité, aider Leila devient un refuge dans son propre monde imaginaire.

Notre avis: –

En compétition à la Mostra de #Venise79 nous regrettions que quelques films (Gavras et Inarritu pour ne pas les citer) proposent des films techniquement très pensés et maîtrisé mais vide, quand nous en avions d’autres au fond plus intéressant mais à la forme anodine. Eh bien #ShabDakheliDivar (#BeyondTheWall) film iranien de Vahid Jalilvand en compétition réussit l’exploit d’avoir ni l’un ni l’autre. Très influencé par les séries américaines de bas étage, et les séries B qui se prennent au sérieux, le film a réussi l’exploit de nous ennuyer de tout son long sans que l’on ne trouve un plan ou une thématique qui nous puisse ne serait-ce qu’esquisser un « Ah oui quand même ». Les premières minutes du film, toute entière consacrée à une mise en place austère, pénible et où très vite on comprend que le réalisateur nous invite dans un film de huis-clos à action (un escape movie ?) qu’il essaye de rendre ingénieux en usant de flashback plus ou moins révélateurs et morcelés, seules aérations vis à vis du huis clos. Les 2h08 du film nous en ont paru six …


LES BANSHEES D’INISHERIN de Martin McDonagh
avec Colin Farrell, Brendan Gleeson, Kerry Condon, Barry Keoghan / Irlande, UK, USA / 109′

Situé sur une île isolée de la côte ouest de l’Irlande, The Banshees of Inisherin suit des amis de toujours, Padraic et Colm, qui se retrouvent dans une impasse lorsque Colm met fin à leur amitié de manière inattendue. Padraic, stupéfait, aidé de sa sœur Siobhan et du jeune insulaire tourmenté Dominic, s’efforce de rétablir la relation, refusant d’accepter un non comme réponse. Mais les efforts répétés de Padraic ne font que renforcer la détermination de son ancien ami et lorsque Colm lance un ultimatum désespéré, les événements s’enveniment rapidement, avec des conséquences choquantes.

Notre avis: *(*)

The banshees of inisherin le nouveau film de #MartinMcDonagh en compétition à #Venise2022 #Venezia79 n’est pas sans rappeler #ThreeBillboards dans sa construction. La trame du scénario permet au réalisateur et metteur en scène de jouer sur les accents, de glisser des jeux de mots en permanence, de faire ressortir dés qu’il le peut l’absurde de situations prévues pour cela. Le film prête à rire, mais potentiellement, une autre lecture est possible, plus philosophique. Les idiots du village, le mode de vie dans une commune isolée, le peu d’importance de la culture et la perte de temps passée à discuter de bêtises sont au cœur du film. Un rien misanthrope donc, le fait est que le film n’imprègne pas la rétine (si l’on excepte les jolis paysages irlandais) plus que cela, et nous parvient plus comme un film comique plus ou moins bien rythmé (les répétitions sont légion) qu’un pamphlet ou un miroir de notre société. #ColinFarrell est crédible en simplet obstiné, qui aime à vivre aux côtés de son double (son âne), qui est meurtri de perdre son principal ami de comptoir, et n’est pas très sensible aux aspirations plus intellectuelles ou artistiques de sa soeur ou de son ancien ami. Comme Three billboards, l’obstination de notre héros le mènera toujours un cran plus bas.


ARGENTINE, 1985 de Santiago Mitre
avec Ricardo Darín, Peter Lanzani, Alejandra Flechner, Santiago Armas, Laura Paredes, Carlos Portaluppi / Argentine, États-Unis / 140′

Argentine, 1985 est inspiré de l’histoire vraie des procureurs Julio Strassera et Luis Moreno Ocampo, qui ont osé enquêter et poursuivre la dictature militaire la plus sanglante d’Argentine en 1985. Sans se laisser décourager par l’influence encore considérable de l’armée au sein de leur fragile nouvelle démocratie, Strassera et Moreno Ocampo ont réuni une jeune équipe juridique composée de héros improbables pour leur combat de David contre Goliath. Sous la menace constante d’eux-mêmes et de leurs familles, ils se sont lancés dans une course contre la montre pour rendre justice aux victimes de la junte militaire.

Notre avis: (*)

Un film Amazon. Voilà qui suffirait presque à le décrire. Alors que le sujet est d’importance, le traitement nuit totalement à sa force. Emmitouflé sous une musique sensée rythmer la compréhension du spectateur, cherchant à épouser les codes du cinéma de procès à grand spectacle, humanisant son héros (interprété par un Ricardo Darin égal à lui même ceci-dit) de façon très téléphoné, la facture du film manque clairement de réalisme. Le travail documentaire sur le procès semble avoir été totalement mis de côté. De nombreuses blagounettes, inutiles, nuisent également au sérieux que le sujet impose naturellement. L’émotion elle-même, à vouloir être refabriquée, ne nous parvient jamais. Les dialogues, insipides, ne permettent pas de relever le tout. Etrange qu’un tel sujet qui a donné quelques bons films n’ait pas plus inspiré son réalisateur et ses producteurs, qui se sont contentés de ce titre au final prétentieux et inadapté #Argentina85.


CHIARA de Susanna Nicchiarelli
avec Margherita Mazzucco, Andrea Carpenzano, Carlotta Natoli, Paola Tiziana Cruciani, Luigi Lo Cascio / Italie, Belgique / 106′

Assise, 1211. Chiara a dix-huit ans et, une nuit, elle s’enfuit de chez elle pour rejoindre son ami Francesco : à partir de ce moment, sa vie change à jamais. Avec charisme et conviction, elle se libère des contraintes familiales et s’oppose au pape lui-même. Elle se bat pour elle-même, pour les femmes qui la rejoignent et pour son rêve de liberté. L’histoire d’une sainte. L’histoire d’une fille et de sa révolution.

Notre avis: ***(*)

Chiara, le plus beau et intéressant film italien en compétition (avec celui de Laura Poitras sur Nan Golding) à la Mostra de #Venise2022. Un récit liturgique, féministe, historique magnifié par une mise en scène qui s’attache d’un côté à composer ses plans comme des tableaux, de l’autre à le rendre plus actuel et accessible en conviant de jolies chorégraphies évocatrices, et quelques dialogues télétransportés depuis notre époque. Très belle proposition en tout cas. Notre avis: **()#Chiara, le plus beau et intéressant film italien en compétition (avec celui de Laura Poitras sur Nan Golding) à la Mostra de #Venise2022. Un récit liturgique, féministe, historique magnifié par une mise en scène qui s’attache d’un côté à composer ses plans comme des tableaux, de l’autre à le rendre plus actuel et accessible en conviant de jolies chorégraphies évocatrices, et quelques dialogues télétransportés depuis notre époque. Très belle proposition en tout cas.


MONICA d’ Andrea Pallaoro
avec Trace Lysette, Patricia Clarkson, Adriana Barraza, Emily Browning, Joshua Close / États-Unis, Italie / 113′

Monica est le portrait intime d’une femme qui revient chez elle après une longue absence pour affronter les blessures de son passé. Renouant avec sa mère et le reste de sa famille pour la première fois depuis son départ à l’adolescence, Monica s’engage sur la voie de la guérison et de l’acceptation.
Le film plonge dans le monde intérieur et l’état d’esprit de Monica, sa douleur et ses peurs, ses besoins et ses désirs, pour explorer les thèmes universels de l’abandon et du pardon.

Notre avis: **.


#Monica en compétition à la Mostra de #Venise2022 (#Venezia79) représente un autre cas de films qu’il nous semble compliqué de critiquer (pour nous, mais surtout pour les autres) en toute objectivité. Du fait qu’il colle pleinement à son époque. Un peu comme Flee qui reçoit un accueil critique dithyrambique. Mais pour l’un comme pour l’autre, si l’on en revient à l’exercice de critique pure, en faisant abstraction de l’émotion liée au sujet en lui même, et à sa mise en avant conjecturelle dans une société en mouvement (quand d’autres luttes, inégalités, traitement inappropriés sont encore tues, ou négligées), quelques points de notation se perdent à ne regarder que l’objet cinématographique en tant que tel. Monica propose une forme certes pas inintéressante, avec quelques jolies idées de mise en scène et une fluidité manifeste, mais en rien il ne s’aventure dans une expérience cinématographique osée. Le film vaut pour son portrait, ses non dits surtout, et la pudeur dont il fait l’objet, pour mieux faire ressortir la force de son message, que nous ne dévoilerons aucunement dans ce billet, au risque précisément d’ôter au film son principal effet envoutant. En soi, donc Monica se raccroche bien plus à un joli portrait cinématographique, que l’on aime à découvrir dans des cinémas d’auteur, qu’à une oeuvre puissante que l’on recherche dans les festivals de premier rang.


KHERS NIST (SANS OURS) de Jafar Panahi
avec Jafar Panahi, Naser Hashemi, Vahid Mobaseri, Bakhtiar Panjeei, Mina Kavani, Reza Heydari / Iran / 107′

Khers Nist dépeint deux histoires d’amour parallèles. Dans les deux, les amoureux sont troublés par des obstacles cachés et inévitables, la force de la superstition et la mécanique du pouvoir.

Notre avis: ***

#KhersNist de #JafarPanahi s’inscrit dans la lignée de l’œuvre de Panahi – et de celle de son maître Kiarostami- et de trois visages, son précédent long. Nous suivons Panahi installé dans un village et en déplacement dans son SUV (comme nous suivions Kiarostami) non loin de la frontière entre l’Iran et l’Azerbaïdjan où Panahi s’est installé afin de pouvoir tourner librement un film sur l’exode, la traversée de la frontière iranienne pour rejoindre l’Europe. Comme Kiarostami, tout part d’un dispositif, visant le plus que possible à brouiller les lignes entre le réel et la fiction. La fiction peut se glisser en reprise du réel, le réel nourrir la fiction, les prises d’images se multiplient – le film que l’on voit, le film que Panahi réalise dans le film et observe depuis son écran de contrôle, les images captées pour la réalisation du film, les images prises par l’appareil photo de Panahi dans le film, afin de nourrir bien plus encore les différents film. Les mises en abîme se retrouvent également au travers des personnages, dont le film , nous dit-on s’inspire de la vie réelle passée, mais semble-t-il encore, au présent, et bien entendu, et l’effet le plus vertigineux se trouve sûrement là, dans les oscillations de Panahi entre son appartement et la frontière, l’idée pouvant lui venir de quitter l’Iran fasse aux menaces dont il faisait l’objet (l’histoire l’a depuis rattrapé, Panahi est incarcéré, et nous avons posé la question à l’actrice principale si elle pouvait nous donner des nouvelles, sa réponse fut qu’elle n’y est pas autorisée, et on a clairement lu de la crainte sur son visage). Panahi questionne dans ce film (No Bears en anglais, pas d’ours) une part de l’Iran actuel, mais aussi les traditions qui l’emmènent dans un imbroglio dont il aura bien du mal à se sortir, et qui fait planer une autre menace, qu’il a tendance à prendre à la légère. Malin et vertigineux, surprenant dans sa conception, l’exercice théorique pourrait valoir un prix (au delà du message politique, Venise n’est pas Berlin) à Panahi.


TOUTE LA BEAUTÉ ET L’EFFUSION DE SANG de Laura Poitras
USA / 117′

All the Beauty and the Bloodshed est une histoire épique et émotionnelle de l’artiste et militante de renommée internationale Nan Goldin, racontée à travers ses diaporamas, des dialogues intimes, des photographies révolutionnaires et des images rares de son combat pour que la famille Sackler soit tenue responsable de la crise des overdoses. Le film entremêle le passé et le présent de Nan Goldin, le côté profondément personnel et le côté politique urgent, des actions de P.A.I.N. dans des institutions artistiques renommées aux photographies de ses amis et de ses pairs, en passant par son œuvre dévastatrice The Ballad of Sexual Dependency et sa légendaire exposition sur le sida de 1989, censurée par le NEA, Witnesses : Against Our Vanishing.
L’histoire commence avec P.A.I.N., un groupe qu’elle a fondé pour faire honte aux musées afin qu’ils refusent l’argent de Sackler, pour déstigmatiser la dépendance et pour promouvoir la réduction des risques. Inspirés par Act Up, ils ont orchestré des manifestations pour dénoncer les Sackler et les crimes de Purdue Pharma, fabricant de l’OxyContin. Les œuvres d’art de Goldin, The Ballad of Sexual Dependency, The Other Side, Sisters, Saints and Sibyls et Memory Lost, sont au cœur du film. Dans ces œuvres, Goldin capture ses amitiés avec beauté et tendresse. Ces amitiés, ainsi que l’héritage de sa sœur Barbara, sont le point d’ancrage de tout l’art de Goldin.

Notre avis: ****


Premier Coup de coeur en compétition #venezia79 le très riche documentaire All The Beauty And The Bloodshed de Laura Poitras. Difficile de le critiquer sous un angle « critique cinéma » puisqu’il s’agit d’un documentaire à part entière, qui monte des images sur un texte enregistré, et suit Nan Golding dans son passé, son art, ses combats, son présent, pour délivrer un message universel et très intime tout à la fois. La richesse du sujet, le travail d’assemblage et le dispositif documentaire sont tout simplement brillants.
[mais plus encore qu’il nous apparaît difficile de comparer deux films de genres très différents], il nous semble ici que l’exercice perd tout sens, d’une part car la critique d’un documentaire, quand il ne comporte pas de fiction ou de production purement créative peut demander une expertise différente -notamment journalistique, voire politique – même si certaines grilles de lectures peuvent être communes. D’autre part car il nous semble que le documentaire constitue une famille à part entière, et appartient à une sous famille du cinéma, que nous aimons également (preuve en est ici et lorsque nous couvrons des évènements tels que le FID) mais pour lequel, peu importe la forme, le sujet tient une part importante dans notre réception, et donc, pour lequel nous faisons preuve de plus de subjectivité. Pour pousser plus loin encore la réflexion, devrait-on par exemple ouvrir les festival de cinéma aux livres ? ou aux reportages TV ? ou aux séries ? ]


UN COUPLE de Frederick Wiseman
avec Nathalie Boutefeu / France, USA / 64′

Un couple est un film sur une relation à long terme entre un homme et une femme. L’homme est Léon Tolstoï. La femme est son épouse, Sophia. Ils ont été mariés pendant 36 ans, ont eu 13 enfants dont neuf ont survécu. Chacun tenait un journal intime. Bien qu’ils aient vécu ensemble, dans la même maison, ils s’écrivaient fréquemment des lettres. Léon Tolstoï insistait pour qu’ils lisent leur journal à haute voix aux invités lors des dîners. Les Tolstoï formaient également un couple dysfonctionnel, se disputant fréquemment et étant très malheureux l’un envers l’autre, tout en profitant occasionnellement de moments passionnés de réconciliation. Le film est un monologue de Sophia sur les joies et les difficultés de leur vie commune, librement inspiré de leurs lettres et de leurs journaux intimes. Le film a été tourné dans un magnifique jardin de Belle Île, une île au large des côtes bretonnes. La vie visible et souterraine du jardin est également un élément important de l’histoire du couple Un.

Notre avis: **


LE FILS de Florian Zeller
avec Hugh Jackman, Laura Dern, Vanessa Kirby, Zen McGrath, Anthony Hopkins, Hugh Quarshie / UK / 124′

Un drame qui suit une famille qui lutte pour se réunir après s’être effondrée. The Son est centré sur Peter, dont la vie trépidante avec son bébé et sa nouvelle compagne Beth est bouleversée lorsque son ex-femme Kate apparaît avec leur fils Nicholas, qui est maintenant un adolescent. Le jeune homme a disparu de l’école depuis des mois et est perturbé, distant et en colère. Peter s’efforce de prendre soin de Nicholas comme il aurait aimé que son propre père le fasse, tout en jonglant avec le travail, le nouveau fils de Beth et lui, et l’offre du poste de ses rêves à Washington. Cependant, en se tournant vers le passé pour corriger ses erreurs, il perd de vue la façon de s’occuper de Nicholas dans le présent.

Notre avis: *()


Nous serions intéressés de voir ce que le texte de Zeller pourrait donner si la réalisation était confiée à Inarritu, Aranovski, Gavras, ou à l’opposé à Fukada … Car #TheSon au niveau du texte, des situations, même si cela repose sur des techniques plutôt manipulatrices, parvient à son objectif: interroger, émouvoir et questionner la culpabilité d’un père face à la maladie psychiatrique. Il le fait avec une dose de réalisme, un sens de l’observation qui nous fait dire que cette histoire, dédié à Gabriel (Le fils de sa compagne Marine Delterme probablement) part d’une histoire vraie. En conférence de presse, Zeller déclare qu’il s’agit de son récit le plus personnel, non pas qu’il ait connu une telle situation, mais que ce sont des sentiments qui lui sont très familiers. Sur le fond donc, le sujet psychiatrique, confronté à une approche dans un premier temps psychologique, mais aussi à une chorégraphie de sentiments et de situations alternant la pluie et le beau temps, parfois de façon très soudaine (les orages suivent les moment les plus radieux, un rien manipulateur vous dit-on – mais pour ce qui est du réalisme cela est plutôt bien vu) mérite qu’on s’y attarde, d’autant que le cinéma a trop souvent eu le tort de magnifier la maladie mentale, de l’horrifier, ou de trop la dramatiser et très souvent de façon si caricaturale. Le procédé qui consiste à scruter le sentiment de culpabilité et de chercher à trouver une lecture rationnelle sur de l’irrationnel se prête également parfaitement à l’entreprise de Zeller de parler sincèrement d’un sujet parfois méconnu, qui fait peur, et souffrir. Sur la forme, hélas Zeller a recours à des techniques de dramatisation à l’américaine (insatiables et stridents violons complétant une tout aussi indigeste partition – si l’on puit dire – au piano). En soulignant les situations, en éclairant les scènes sur leurs intentions, (la mise en scène étant au diapason, les mouvements de caméra eux aussi vont dans le sens de l’émotion que le spectateur ait invité à partager), Zeller nous rend son récit bien plus artificiel et explicite qu’il ne devrait l’être !


LES MIENS de Roschdy Zem
avec Sami Bouajila, Roschdy Zem, Meriem Serbah, Maïwenn, Rachid Bouchareb, Abel Jafrei, Nina Zem, Carl Malapa, Anaïde Rozam, Lila Fernandez, Farida Ouchani / France / 86′

Moussa a toujours été gentil, altruiste et présent pour sa famille. Contrairement à son frère Ryad, un présentateur de télévision très en vue qui est largement critiqué par son entourage pour son égocentrisme. Son seul défenseur est Moussa, qui éprouve une grande admiration pour son frère. Puis une chute accidentelle laisse Moussa avec un grave traumatisme crânien. Devenu méconnaissable, il parle sans filtre, assène des vérités brutales à ses amis et à sa famille, et finit par se brouiller avec tout le monde, sauf avec Ryad…

Notre avis: ***.

#LesMiens de #RoschdyZem en compétition à la Mostra de #Venise2022. Roschdy Zem a co-écrit le film avec Maiwenn et son influence est manifeste, que ce soit au niveau des dialogues punchés, de la relation au rythme des émotions, ou des thématiques familiales. Ce qui rapproche son cinéma de Pialat. Mais il ne faut pas d’y tromper, il s’agit bel et bien d’un film de Roschdy Zem , qui y glisse non seulement son propre matériau familial (on imagine), ses fantasmes (il s’invente un rôle de commentateur d’une émission de football, le late football club très fortement inspiré du Canal Football Club), son ressenti vis à vis de la famille mais aussi ses idées et convictions. On imagine aisément que les reproches qui sont adressés à son personnage dans le film par ses frères et sœurs et son épouse sont ceux qui lui sont adressés dans la vraie vie, par analogie de position sociale (il est celui de la famille qui réussit et est très occupé par son travail). Le matériau intime lui appartient donc, et ce n’est nul hasard s’il confie le rôle principal à son ami Sami Bouajila et enrôle également sa fille Nina. Mais tous ces éléments valent décor quant à la véritable thématique traversée par le film, ou plus exactement permettent d’alimenter le premier niveau de lecture, celui de l’histoire familiale intime, et de l’évènement qui va venir changer la donne, libérer la parole (la catharsis si chère à Maiwenn). Car à se référer au titre, « Les miens », l’ambition nous semble plus large, ce qui se joue au sein de cette famille porte une dimension symbolique assez évidentes (souvenez-vous par par exemple de synonymes et de ses personnages Nation). L’entraide entre frères et sœurs, le rapport de soumission, l’emprise quasi maternelle de la sœur sur toute sa famille, le reproche d’abandon de la famille, la déchirure, le divorce, la reconstruction après le traumatisme … et si Roschdy Zem nous parlait des siens au sens plus global, de son peuple, et de son rapport à la France … Outre sa bonne idée conceptuelle, Les miens développe une intrigue qui surprend, dont on se demande le degré de fantaisie, et le final peu prévisible vient nous confirmer que sa sélection en compétition officielle (malgré son apparence très grand public) se justifiait bien.


LES ENFANTS DES AUTRES de Rebecca Zlotowski
avec Virginie Efira, Roschdy Zem, Chiara Mastroianni, Callie Ferreira-Goncalves, Yamée Couture, Henri-Noël Tabary, Victor Lefebvre, Sébastien Pouderoux, Michel Zlotowski, Mireille Perrier / France / 104′

Rachel a 40 ans, pas d’enfants. Elle aime sa vie : ses lycéens, ses amis, son ex, ses cours de guitare. Lorsqu’elle tombe amoureuse d’Ali, elle s’attache à Leila, sa fille de 4 ans. Elle la borde dans son lit, s’occupe d’elle, l’aime comme sa propre fille. Mais aimer les enfants des autres est risqué.

Notre avis: **(*)

Les Enfants Des Autres de Rebecca Zlotowski à la Mostra de #Venise2022(#Venezia79). Un sujet peu fréquemment traité au cinéma. Le film tarde à trouver sa singularité mais y parvient petit à petit, à force de délicatesse, et dans une volonté d’affirmation sensible , prégnante. Les non-dits, ou les peu-dits, raisonnent. Wiseman fait une apparition rigolote, en homme sage … Comme le fait dire Zlotowski à son personnage principal (toujours intéressante Efira), les femmes devraient « arrêter de s’excuser (entre elles) pour les hommes ». Voilà précisément l’un des points forts du film. Sur un sujet aussi naturellement féminin, Zlotowski parvient, en accusant sobrement, sans violence ni fracas, à embrasser la perspective masculine, car le sujet psychologique s’accompagne de répercussions sur le couple, et la réalisatrice française parvient à le faire ressortir sincèrement (la réussite du film tient sûrement aussi au fait qu’elle parle d’un sujet qui la taraude). Autre bon point, sur le fond toujours (la forme ne ressort pas particulièrement, pour mieux se centrer sur le sujet), la réalisatrice fait le choix d’aérer son récit par une autre réflexion, autour de la fonction de professeur, pour mieux affirmer, que la vie continue, que les satisfactions s’obtiennent là où elles peuvent s’obtenir, et qu’elles donnent du sens à l’action.

HORS COMPÉTITION



LE SOLEIL SUSPENDU de Francesco Carrozzini
avec Alessandro Borghi, Jessica Brown Findlay, Sam Spruell, Frederick Schmidt, Raphael Vicas, Peter Mullan, Charles Dance / Italie, UK / 93′


KAPAG WALA NANG MGA ALON (QUAND LES VAGUES SONT PARTIES) de Lav Diaz
avec John Lloyd Cruz, Ronnie Lazaro, Shamaine Centenera- Buencamino, Dms Boongaling, Danilo Ledesma, Aryanne Gollena, Roel Laguerta, Neil Alvin, Delas Alas, Ronaliza Jintalan / Philippines, France, Portugal, Danemark / 187′


LIVING d’Oliver Hermanus
avec Bill Nighy, Aimee Lou Wood, Alex Sharp, Tom Burke / UK / 102′


DEAD FOR A DOLLAR de Walter Hill
avec Christoph Waltz, Willem Dafoe, Rachel Brosnahan, Warren Burke, Benjamin Bratt / USA, Canada / 106′


KÕNE TAEVAST (L’APPEL DE DIEU) de KIM Ki-DUK
avec Zhanel Sergazina, Abylai Maratov / Estonie, Lituanie, Kirghizistan / 81′


DREAMIN’ WILD de Bill Pohlad
avec Casey Affleck, Noah Jupe, Zooey Deschanel, Chris Messina, Jack Dylan Grazer, Walton Goggins, Beau Bridges / USA / 110′

Et si un rêve d’enfant se réalisait soudainement, mais trente ans plus tard ? C’est ce qui est arrivé au chanteur et compositeur Donnie Emerson. Son rêve de succès s’est soudainement et inopinément réalisé, mais seulement à l’approche de ses 50 ans. Et si l’espoir d’une seconde chance est né, les fantômes du passé et les émotions enfouies depuis longtemps sont également apparus, alors que Donnie, son frère Joe et toute leur famille ont dû faire face à leur nouvelle célébrité. Dreamin’ Wild est une incroyable histoire vraie d’amour, d’espoir, de famille, de culpabilité et de responsabilité.

Notre avis: **

Nous n’aurions probablement été tendre avec #DreamingWild présenté hors compétition à la Mostra de Venise réunissant à l’écran #CaseyAffleck (très souvent plus intéressant que son frère) et #zooeydeschanel si le film avait été projeté en compétition et si nous l’avions vu en début de festival. Mais voilà, ce film très musical, qui cherche à raconter une histoire simple avec des gens bienveillants qui entourent un jeune garçon, artiste exigeant mais égoïste et ambitieux, autour de l’histoire vraie des Emerson Brothers dont l’un des albums a connu un succès plus de 30 ans après sa sortie, possède quelques atouts indéniables qui viennent contrebalancer ses tout aussi indéniables défauts. En premier lieu, nous citions la performance intéressante de Casey Aflleck (en playback ceci dit), mais dont le regard, les gestes et attitudes permettent d’atteindre ce sentiment étrange qu’il traverse, celui d’un rêve d’adolescent devenu son échec, son traumatisme, et sa dette envers sa famille. En second lieu, la musique en elle même, aux accents certes folk, porte le film, et lui confère une touche là aussi nostalgique et étrange. Ensuite, il y a le point de vu du réalisateur qui longtemps tu -on pense à tort à une success story musical convenue, s’affirme enfin lorsque le nœud psychologique prend le dessus sur le reste. Quelque part, l’entreprise n’est pas si loin de A Star is born récemment remis au goût du jour par Bradley Cooper. Alors, oui le film reste commercial dans son ensemble, et ne prétend pas à concourir dans la catégorie film d’artiste, mais ses quelques bons passages et la musique nous restent encore un peu en tête.


MASTER GARDENER de Paul Schrader
avec Joel Edgerton, Sigourney Weaver, Quintessa Swindell, Esai Morales / USA / 111′

Narvel Roth est l’horticulteur méticuleux des Jardins de Gracewood. Il se consacre autant à l’entretien des terrains de ce magnifique domaine historique qu’à la satisfaction de son employeur, la riche dame douairière Mme Norma Haverhill. Lorsque Mme Haverhill exige qu’il prenne sa petite-nièce Maya comme nouvelle apprentie, le chaos s’installe dans l’existence spartiate de Narvel.

Notre avis: ***.

#MasterGardener de #PaulSchrader est projeté hors compétition à la Mostra de #Venise2022 (#Venezia79), et quelque part, il s’agit d’une injustice si l’on compare aux autres films de la compétition plutôt faiblarde dans son premier tiers, avec de nombreuses déceptions (Cannes peut se réjouir de ne pas accepter les productions Netflix et Amazon, elles ne sont pas au niveau pour le moment). Master Gardener présente tout des ingrédients des bons films de Schrader. Moins visuel que The Card Reader, il le devance assez largement sur la question de fond. Rédemption, profondeur du sentiment enfoui, personnages blessés, traumatisés, marqué et en constante interrogation sur leur vie, confrontations des mondes, relations amoureuses et bienfaitrices, jalousies, emportements, on se croirait revenu à la grande époque des Ferrara et Scorcese, avec ceci dit une ouverture intéressante, d’inspiration probablement plus littéraire – on pense aussi au dernier empereur étrangement, aussi trompeuse que révélatrice des écarts dont Schräder s’est fait le fort ces derniers temps (le très bel hommage à Bresson sur le chemin de la rédemption, et le très mauvais Dog Eat Dog en attestent au besoin). Surprenant de tout son long, sans ambition trop hautes (et sans génie particulier) mais un rythme bien pensé, des moments oniriques simples et efficaces, une certaine ramification du scénario, Schräder ne nous livre certes pas un film culte, révolutionnaire ou marquant son époque, mais en reproduisant un geste passé, avec sérieux, il nous donne à voir un film peut être un peu moins bon qu’un Taxi Driver par exemple, mais pas si éloigné. En cela, nous pouvons aussi juger que le cinéma appelle les cinéastes à se renouveller et que ce qui fut un temps prisé, porté aux nus, peut deux décennies plus tard, ne plus être dans l’air du temps, les ficelles pouvant devenir visibles. Voilà peut être l’explication principale à ce que MasterGardener ne figure pas en compétition, à moins que l’hommage qui lui est rendu cette année n’ait poussé les organisateurs à relayer le film hors compétition.


SICCITÀ (DRY) de Paolo Virzì
Avec Silvio Orlando. Valerio Mastandrea, Elena Lietti, Tommaso Ragno, Claudia Pandolfi, Vinicio Marchioni, Monica Bellucci, Diego Ribon, Max Tortora, Emanuela Fanelli, Gabriel Montesi, Sara Serraiocco / Italie / 124′


PEARL de Ti West
avec Mia Goth, David Corenswet, Tandi Wright, Matthew Sunderland, Emma Jenkins-Purro / USA / 102′


DON’T WORRY DARLING d’Olivia Wilde
avec Florence Pugh, Harry Styles, Chris Pine, Olivia Wilde, KiKi Layne, Gemma Chan / USA / 123′

NON FICTION


FREEDOM ON FIRE : UKRAINE’S FIGHT FOR FREEDOM de Evgeny Afineevsky
Ukraine, UK, USA / 118′


THE MATCHMAKER de Benedetta Argenteri
Italie / 90′


GLI ULTIMI GIORNI DELL’UMANITÀ de Enrico Ghezzi, Alessandro Gagliardo
avec Aura Ghezzi / Italie / 196′


A COMPASSION SPY de Steve James
avec Ted Hall, Joan Hall, Ruth London, Sarah Hall, Sarah Sax, Boria Sax, Joseph Albright, Marcia Kunstel, Daniel Axelrod / USA, UK / 102′


MUSIQUE POUR PIGEONS NOIRS de Jørgen Leth, Andreas Koefoed
avec Jakob Bro, Lee Konitz, Thomas Morgan, Paul Motian, Bill Frisell, Mark Turner, Joe Lovano, Andrew Cyrille, Palle Mikkelborg, Jon Christensen, Manfred Eicher, Midori Takada / Danemark / 92′


LE PROCES DE KIEV de Sergei Loznitsa
Restauration Jonas Zagorskas / Pays-Bas, Ukraine / 106′


IN VIAGGIO de Gianfranco Rosi
Italie / 80′


BOBI WINE : PRÉSIDENT DU GHETTO de Christopher Sharp, Moses Bwayo
Ouganda, Royaume-Uni, Etats-Unis / 121


NUCLÉAIRE d’Oliver Stone
ETATS-UNIS / 106

SÉRIE


RIGET EXODUS de Lars von Trier
avec Bodil Jørgensen, Mikael Persbrandt, Tuva Novotny, Lars Mikkelsen, Nikolaj Lie Kaas, Nicolas Bro, Alexander Skarsgård / Danemark / 295′


COPENHAGEN COWBOY de Nicolas Winding Refn
avec Angela Bundalovic, Lola Corfixen, Zlatko Buric, Andreas Lykke Jørgensen, Jason Hendil-Forssell, Li Ii Zhang, Dragana Milutinovic / Danemark / 292′