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La chimère

Mis à jour le 27 mai, 2023

Un film de Alice Rohrwacher

Avec: Josh O’Connor, Isabella Rossellini, Carol Duarte, Alba Rohrwacher, Vincenzo Nemolato, Chiara Pazzaglia, Luca Chikovani

L’histoire se situe dans les années 80, Arthur, revient dans une petite ville sur le littoral de la mer Tyrrhénienne. Il est chasseur de vestiges étrusques, activité illégale qu’il pratique avec une bande de joyeux brigands. Arthur a un don : il ressent le vide. Le vide qu’a laissé en lui le souvenir de son amour perdu, Beniamina.

Notre avis 1: ****

Alice Rohrwacher poursuit son œuvre mashup qui brasse allègrement l’ensemble de ses références (nombreuses) pour nous proposer des films très singuliers, littéraires et poétiques. La forme du conte ou de la fable lui sied d’autant plus qu’elle y trouve l’occasion de démontrer son approche par essence littéraire qui multiplie les références aux mythes, figures, symboles et autres métaphores, lesquelles structurent littéralement sa narration multi-strates, multi-forme. Plus que jamais avec La Chimère, elle semble s’affirmer dans la voie qu’elle a ouverte, celle que certains ont raccroché au réalisme magique, tout en faisant preuve d’une grande liberté et d’un plaisir qu’elle nous fait partagé. Formellement, nous continuons de noter l’influence de maîtres italiens (de Pasolini à Fellini, en passant par Risi ou Scola…), des accents bressonniens quant à la vision du monde, et au constat amer qu’Alice Rohrwacher fait des Hommes d’une manière générale, et des hommes en particulier. Cupidité, pillage des « trésors », de la culture, dénigrement des femmes (machisme), destruction de la planète, sur le fond nous sommes sur des thématiques pas si éloignées de celles qui motivaient entre autres l’Argent, le Diable probablement, mais aussi, par l’invocation des troubadours, pas si loin de Lancelot du Lac … La forme, par contre, évite toute austérité, et, s’éloigne de ce néo-réalisme ou de cette approche quasi documentaire qui nourrissait les premières parties de ses films précédents, pour mieux se rapprocher de quelque chose tout à la fois hybride et personnel. Hybride en ce qu’il convoque les monstres italiens, le collectif, singulier en ce qu’il s’intéresse à un héros étranger au propre comme au figuré, pensé pour être risible par Alice Rohrwacher, interroge toujours la frontière entre la ville (la civilisation) et ses banlieues (ou plus exactement dans le cas de Rohrwacher la ruralité, le monde agraire qui ont bercé son enfance). En voulant interroger la frontière entre le monde des vivants et celui des morts, en confrontant le passé et l’Italie des années 80, en nous parlant d’italie et d’italiens, la fable écologique surprend, divertit, nous fait sourire et donne toute sa matière aux instants poétiques, nombreux, à ses oiseaux dans le ciel, que les étrusques (là d’où Alice Rohrwacher vient) vénéraient. Comme elle nous le dit, nous sommes plusieurs à cohabiter dans la même maison, plantes, animaux, hommes et divinités, charge à nous d’en prendre soin.

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