Le scénario de Boîte noire démarre sur une catastrophe aérienne fictionnelle mais Yann Gozlan livre bel et bien un film-enquête délaissant le spectaculaire au profit d’ambitions lorgnant vers le cinéma d’auteur. Boîte noire dont le réalisateur est aussi le scénariste à l’image des précédentes réalisations de Gozlan (deux courts-métrages puis quatre longs-métrages depuis 2004) reconstitue aussi le duo formé en 2015 dans Un homme idéal entre le cinéaste et l’acteur Pierre Niney qui endosse de nouveau le rôle principal.
Que s’est-il passé à bord du vol Dubaï-Paris avant son crash dans le massif alpin ? Technicien au BEA, autorité responsable des enquêtes de sécurité dans l’aviation civile, Mathieu Vasseur est propulsé enquêteur en chef sur une catastrophe aérienne sans précédent. Erreur de pilotage ? Défaillance technique ? Acte terroriste ? L’analyse minutieuse des boîtes noires va pousser Mathieu à mener en secret sa propre investigation. Il ignore encore jusqu’où va le mener sa quête de vérité.
Dans un faux plan-séquence, la scène liminaire de Boîte noire fait se déplacer en travelling arrière la caméra du cockpit d’un avion vers l’arrière de l’appareil. Cette séquence intervient quelques instants avant le crash de l’avion et permet d’entendre le début des échanges entre les deux copilotes puis de visualiser quelques passagers du vol Dubaï-Paris avant d’entrer dans les entrailles de l’avion jusqu’à la boîte noire invoquée par le titre du film. Celle-ci sera au cœur du film puisque l’écoute de son contenu et l’analyse de celui-ci par l’acousticien interprété par Pierre Niney devra permettre d’orienter l’enquête vers la bonne piste. En début de métrage, aucune hypothèse ne peut être écartée. Avons-nous affaire à un incident technique, à une faute de pilotage, à un attentat terroriste ou à un acte de piratage ?
Pour résoudre ce mystère, Yann Gozlan axe son schéma narratif sur les trois verbes d’action inscrits sur l’affiche du film : Ecouter, Enquêter, Révéler. La feuille de route est ainsi établie et scrupuleusement suivie par le cinéaste au point que le spectateur pourrait y trouver matière à découper le film en trois parties successivement titrées : Ecouter, Enquêter, Révéler. Ce canevas narratif ressemble en plusieurs points à celui, efficace, mis en œuvre par Antonin Baudry dans Le chant du loup (2019). D’ailleurs, à l’image de Baudry, Gozlan est réalisateur et auteur de son long métrage. Il y a chez ces deux auteurs des accointances non feintes.
Le récit mis en œuvre dans Boîte noire est globalement bien mené et maîtrisé bien que le scénario laisse apparaître quelques faiblesses. La plus voyante sera celle d’une scène non vécue par le personnage interprété par Niney mais que celui-ci « vivra » dans une sorte de rêve. Cette scène fantasmée vient mettre un terme à l’une des principales pistes d’investigation. La pirouette scénaristique mise en scène ici relève cependant plus de la facilité que d’une écriture rigoureuse. Pareil reproche pourra être fait face un épilogue trop elliptique, bâclé et sans originalité. Boîte noire risque donc de laisser une partie de ses spectateurs sur sa faim.
En fait, le film ne manque pas d’intérêt dans sa première partie technique durant laquelle les protagonistes cherchent à expliquer les éventuelles causes techniques du crash. Dans sa seconde partie, Boîte noire se révèle plus conventionnel dans le déroulé de l’enquête mise en scène. L’écriture y est alors moins inspirée car elle relève bien davantage de l’exploitation des codes des films d’enquête. L’engageant film d’auteur se mue ainsi peu à peu en un récit normé jusqu’à un épilogue peu inspiré évoqué plus haut.
Comme exposé en préambule, Boîte noire est le cadre d’une nouvelle collaboration entre Gozlan et Niney qui, comme dans Un homme idéal, hérite du rôle principal. Ici, il interprète un acousticien employé par le Bureau d’Enquêtes et d’Analyses. Si l’histoire racontée est purement fictionnelle, le cinéaste prend soin de l’arrimer à quelques organisations et entreprises réelles, le BEA donc mais aussi Safran par exemple. Au-delà des placements de produits que nous tairons, l’objectif visant à rendre sa fiction possiblement réaliste paraît atteint.
Aux côtés de Niney, nous retrouvons dans les rôles principaux Lou de Laâge, André Dussollier, Olivier Rabourdin et Aurélien Recoing notamment. Les performances de la distribution sont plutôt honorables bien que nous puissions regretter la juvénilité des deux premiers nommés sans nullement mettre en cause leur performance d’acteur. En effet, la caractérisation de leur personnage respectif appelait à distribuer ces rôles à un acteur et à une actrice plus âgés.
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