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The nightwalk, Confinés Dehors, Empty Places: quand les courts-métrages évoquent le confinement

Last updated on 19 mars, 2021

Si 2021 rimait avec l’espoir de revoir nos salles obscures, il nous faudra, pour cela, patienter encore quelques temps. Cette année, le festival de courts métrages de Clermont-Ferrand s’est déroulé en ligne dans un contexte marqué par la recrudescence de la Covid 19. Que pourrait-t-il transparaître de cette période particulière sur nos écrans ? Quelques courts-métrages répondent à cette question.

Connaissez-vous l’art du strangely familiar picture ? Ces vidéos à la mode visionnées des millions de fois sur Youtube nous montrent des lieux étrangement familiers, très souvent des lieux publics, qui prennent une tournure dérangeante voire angoissante par le fait que ces lieux soient vidés de toute vie humaine et de toute activité.
Dans son court-métrage d’animation Empty places, Geoffroy de Crecy (frère d’Etienne le célèbre DJ qui fondit avec quelques autres la french touch) s’inscrit dans cette thématique tout en conservant de l’animation via l’observation des mouvements mécaniques des machines qui tournent seules en continue.
D’abord filmés en gros plans, nous peinons quelques fois à comprendre la situation globale des lieux. Mais la compréhension de l’objet arrive plus tard, au décentrement de la caméra pour filmer une vue d’ensemble. Le tapis roulant de l’aéroport laisse place à une vision plus vive de l’ensemble de la salle d’arrivée nue, le quadrillage futuriste du début laisse filtrer les reflets d’une boîte de nuit abandonnée à travers les reflets d’une boule à facette.
Ce court-métrage tourné avant la pandémie mondiale du coronavirus nous laisse un goût amer face à ces lieux vidés de toute population, des bureaux d’entreprises au parc d’attraction, en passant par l’aéroport. Mais le court métrage est aussi une ode à la nostalgie et à l’observation des machines laissées en autonomie répétant inlassablement des mouvements mécaniques.


« Est-ce que c’est douloureux d’être seul ? ». The nightwalk d’Adriano Valerio s’ouvre sur cette question face à des images d’archives du Tour de France. Jeune étudiant parti en Chine pour un échange universitaire, Jarvis subit de plein fouet le début de la pandémie. Quelques semaines après son arrivée à Shangaï, Jarvis se retrouve confiné dans son appartement. Une connexion internet non optimale, seulement quelques rencontres en ces courtes semaines, ne parlant pas la langue du pays dans lequel il se retrouve bloqué, le jeune étudiant narre ses jours de confinement.
Le court-métrage est composé de vidéos de son enfance, de photographies sombres prises au sein de l’appartement, de courts passages de films auxquels il fait référence et de vues plus globales de désinfections de lieux publics et du bruit strident des sirènes. La fille qui lui plaisait ne répond pas, son voisin est emmené une nuit, le seul contact de l’étudiant dans cette ville étrangère se trouve en la personne de Xian, rencontré en soirée quelques temps plus tôt, qui lui propose de venir le voir un soir.
De ce court-métrage ressort l’angoisse de la situation dans laquelle est coincé Jarvis, dans un appartement exigu et cette ville étrangère. Comme un « rat en cage » , bloqué chez lui par les injonctions de confinement et la surveillance de son immeuble, Jarvis broie du noir, dort des journées entières jusqu’à ne plus pouvoir dormir du tout. En entendant une sirène une nuit, Jarvis nous compte sa tristesse et son angoisse, a pleuré pour sa mère, pour son voisin sans doute mort à l’heure actuelle, pour Lin, la belle chinoise qui ne lui répond pas.
Un soir où le jeune étudiant se sent démuni, son beau-père l’appelle : « D’où on est on ne peut rien faire, mais s’il te plaît, fais attention à toi. On t’aime ». A des milliers de kilomètres de chez lui, la solitude ressentie par Jarvis est celle de nombreux étudiants, qui furent confinés plus ou moins loin de leur famille et qui coupés des liens sociaux et de formation en présentiel ont pu se sentir découragés ou anxieux. Cet appel, sur le moment, c’est la seule chose dont Jarvis avait besoin, comme tant d’autres.
Le 21 février, ne supportant plus cette solitude, Jarvis sort pour retrouver Xian. Le court-métrage se transforme alors. Il ne s’agit plus des introspections de Jarvis qui sont montrées au montage à l’aide d’images et d’archives, mais nous pouvons désormais voir l’étudiant marcher la nuit dans les rues désertes de Shangaï, comme si ne pouvait être filmé que la vie réelle et les instants réellement vécus sont ceux où nous pouvons respirer à nouveau, dehors.  


Si les étudiants peuvent s’être sentis profondément isolés durant cette période de pandémie, Julien Goudichaut recueille de son côté les témoignages d’une autre catégorie sociale au sein du confinement français : les sans domiciles fixes. 20h, les habitants de Paris en solidarité au personnel soignant applaudissent, perçants le silence de la ville. Un homme profite de l’effervescence pour faire l’aumône en bas des fenêtres, mais tout le monde finit par rentrer chez soi. Cette image bouleversante nous montre tout le paradoxe de cette forme de solidarité à l’œuvre au sein de ce premier confinement. Alternant des vues d’une ville de Paris complètement vide, images prises avec d’un drone, et des témoignages de « Confinés dehors » en quête d’argent, ce documentaire laisse percer les difficultés à survivre dans une ville fantôme. De la prostituée au Bois de Boulogne qui tente d’appliquer des règles sanitaires strictes dans son activité à l’homme cherchant des pièces sous les grilles des terrasses de restaurant, il paraît difficile de trouver des revenus quant les rues sont désertes. Sonia, elle, semble contente de ce vide, de l’absence de personnes qui ne peuvent la regarder avec mépris et d’avoir les champs Elysées pour elle seule. Mais il est difficile de trouver des endroits où dormir et certains centres étant fermés, elle ne s’est pas lavée depuis quinze jours. Julien Goudichaut filme de manière émouvante ces invisibles de la République.

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