Mis à jour le 13 octobre, 2020
Jean-Louis réalise en rentrant chez lui que son cœur s’est arrêté. Plus un seul battement dans sa poitrine, aucun pouls, rien. Pourtant, il est conscient, il parle, se déplace. Est-il encore vivant ? Est-il déjà mort ? Ni son ami vétérinaire Michel, ni sa femme Valérie ne trouvent d’explication à cet étrange phénomène. Alors que Jean-Louis panique, Valérie se tourne vers Margaux, sa coach de vie, un peu gourou, pas tout à fait marabout, mais très connectée aux forces occultes. Et elle a une solution qui va mettre Jean-Louis face au tabou ultime…
Nous étions très intrigué lorsque fut dévoilée la sélection officielle de Cannes de découvrir le présence de quelques comédies françaises. Non pas tant que nous considérons la comédie, qui plus est française, comme un genre mineur, bien au contraire, mais parce qu’allier sens de l’humour et profondeur – peut être la seule qualité commune à tous les grands films -, s’apparente à un système à deux équations et trois inconnues, un exercice délicat. Longtemps, certains ont même tenu cet exercice impossible, a priori d’excellentes comédies ont été condamnés à des rangs inférieurs à ceux auxquels ils auraient pu prétendre, en tout cas pour ce qui du petit monde de la critique cinéphile – on ne vous parle donc pas des étoiles allo ciné ou sens critique. Comme souvent, lorsqu’une injustice commence à être mise à découvert, la tentation est forte de la réparer vaille que vaille, quitte à commettre une nouvelle injustice. Ainsi l’année dernière, le festival de Cannes s’était enorgueilli de son palmarès, qui réconciliait succès populaire et succès critique – avouant de la sorte que pendant très longtemps le raisonnement tendait naturellement à les opposer; dont la conséquence fut, à nos yeux, une injustice pour d’autres réalisateurs qui présentaient des films dont la valeur artistique nous semblait plus intéressante – Le traître ou même Once upon a time in Hollywood -, mais aussi, pour Bong Joon Ho lui même, en ne le récompensant pas pour son meilleur film … En qualité de critique, ces débats ont plutôt tendance à nous exaspérer. La popularité d’une œuvre ne présume en rien de sa qualité artistique, et la qualité artistique n’est en rien un frein à la popularité. L’usage de l’humour est une qualité sur le plan artistique, il complète une palette de savoir-faire utile à rendre une œuvre remarquable, mais, pour filer une autre métaphore mathématique, cette qualité n’est ni nécessaire – indispensable – ni suffisante – et c’est ici que le bât blesse le plus souvent dans les comédies industrielles française, elles considèrent que le seul effet comique vaut qualité, ce qui peut suffire pour obtenir de la popularité, d’autant que la recette est éprouvée, pour peu que le marketing suive, mais qui ne suffit pas aux critiques dignes de ce nom, qui par nature et obligation, portent une exigence autre. Ainsi nous pensons que le festival de Cannes ne gagnerait rien à se rapprocher dans ses verdicts des Césars ou des Oscars, des satisfecits et autres exercices d’autocongratulations que la profession s’accorde et que les médias aculturels véhiculent…
Alors quid de cette Origine du monde que nous propose Laurent Lafitte, le plutôt talentueux acteur que l’on avait découvert dans Classe Mannequin, issu de la Comédie Française et qui depuis a fait son chemin et à de nombreuses reprises ses preuves ? Comique ? Profond ? Singulier ? Le principe du film repose sur une idée de départ, saugrenue, improbable et qui de fait génère des situations absurdes propices au comique. Dans l’ensemble celles-ci fonctionnent, et prêtent à sourire voire à rire. On se souvient, pour faire des références cannoises, par instant de la scène finale de Tony Erdmann, qui se jouait à merveille du grotesque des situations créés, en épousant volontiers le ridicule – et non en le raillant comme dans The square. En effet, l’humour que propose l’Origine du monde oscille entre comique de situation, jeux de mots plutôt bien venus interrogeant les sens premiers, mais aussi, hélàs, assume la vulgarité. Il est bien servi par ses quatre interprètes, Laurent Lafitte lui même, Karine Viard, Vincent Macaigne et Hélène Vincent, tout plutôt à leur aise. Nous ne parlerons donc pas de singularité en soi, mais plutôt d’un certain culot, à mettre au crédit de Lafitte. L’esthétique du film ne marque pas, ni dans un sens, ni dans l’autre. L’habillage visuel et sonore brille par sa neutralité, tout au plus nous notons quelques placements de marque par trop évident. Résolument, la forme proposée ne sert ni ne dessert le fond. Chercher à l’analyser semble un exercice futile; les techniciens ont plutôt bien fait leur travail, et l’intention majeure de Lafitte, assurément n’est pas à chercher dans une volonté de nous émerveiller. A ce niveau, il fait preuve d’une humilité plutôt bienvenue en ce qu’une forme plus ambitieuse aurait pu déranger, dérouter, ou peser; mais cela ne reste qu’une hypothèse puisque le parti pris ici diffère.
Il nous reste donc à répondre à cette question que nous soulevions, Lafitte nous propose-t-il un grand film, ou du moins un très bon film ? Que nous reste-t-il après l’avoir vu, quel empreinte laisse-t-il, que l’on ait, ou non, passé un bon moment, rit ? Hélas, absolutely nothing… Le Label Cannes nous semble ici quelque peu usurpé, excessif. De fait, Thierry Frémaux et son équipe en effectuant ce geste – une donnée nous manque, peut être le film aurait-il été hors compétition – n’aident pas forcémentle film, qui devrait trouver son public aisément – le divertissement reste correct, et répétons le, l’idée de départ est culottée – mais ils prennent le risque de déprécier le label en lui même. Risque tout relatif tant le festival de Cannes n’a plus rien à prouver d’une manière générale, tant son histoire parle pour lui, tant le label a su, dans le passé, se démarquer, anticiper les tendances, nourrir et orienter la critique.
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