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Megalopolis – Coppola démiurge

Mis à jour le 18 juillet, 2024

Un film de Francis Ford Coppola

Avec: Adam Driver, Giancarlo Esposito, Nathalie Emmanuel, Aubrey Plaza, Shia LaBeouf, Jon Voight, Jason Schwartzman, Talia Shire, Grace VanderWaal, Laurence Fishburne

La ville de New Rome doit absolument changer, ce qui crée un conflit majeur entre César Catilina, artiste de génie ayant le pouvoir d’arrêter le temps, et le maire archi-conservateur Franklyn Cicero. Le premier rêve d’un avenir utopique idéal alors que le second reste très attaché à un statu quo régressif protecteur de la cupidité, des privilèges et des milices privées. La fille du maire et jet-setteuse Julia Cicero, amoureuse de César Catilina, est tiraillée entre les deux hommes et devra découvrir ce qui lui semble le meilleur pour l’avenir de l’humanité.

Nous sommes unanime à dire que le Megalopolis de Francis Ford Coppola verse dans le film Babylonien … Au sens où les techniciens d’Hollywood l entendent. Mégalo, grandiloquent, très vide et répétitif dans sa première partie, esthétiquement très discutable [malgré le geste de peintre indéniable , le postmodernisme dans lequel il s’inscrit], un happening proposé en projection à Cannes vient quelque peu nous réveiller et introduire une seconde partie un rien plus alerte et consistante dans ses propos. Des torrents de mots et d’images occupent l’espace phonique et visuel, sans grande cohérence, sans instaurer une atmosphère que l’on serait amené à qualifier de lyrique, intéressante ou belle (un côté très démonstratif, une vague incantation à considérer un rapprochement entre le monde montré (à New York – nous reconnaissons Time Square -, pardon New Rome (sic), à une période difficilement situable – imaginaire ou futuriste, nous penchons pour la première hypothèse). L’esthétique ainsi proposée, volontiers exagérée (les traits, les couleurs dorées criardes jusqu’au kitsh, les angles de vue – pour l’heure Coppolesque) ne nous convainc que très peu. Post moderne, futuriste, plutôt que des références de peintres modernes dont se sont probablement inspirés les créateurs de ce Megalopolis en construction (miroir du film), nous viennent plutôt naturellement à l’esprit l’univers d’un James Cameron, un univers non pas carton pâte mais de jeu vidéo clinquant. La vulgarité s’invite également ici ou là, et l’univers viril, déglingué comme pouvait l’être celui du 5ème élément (pour continuer de verser dans la contre référence), n’accorde que très peu de place à une vision sociétale en accord avec les changements que l’époque actuelle réclame (féminisme, écologie, …). Au contraire, le film semble presque se moquer de ces questions, et même du peuple tout entier, puisqu’il ne le représente quasiment pas, ou alors sous une forme massive disgracieuse et sombre. Les dorures, les atmosphères luxueuses sont laissées à quelques riches qui s’adonnent de façon très ludique à une joute politique que certains ont pu rapprocher d’une critique du populisme à la Trump (contre sens notoire puisque Coppola voulait faire ce film de longue date). Une question, entre deux scènes vulgaires, vient à nous tarauder, cette proposition graphique vient-elle réellement de Coppola ou des techniciens qui travaillent pour lui et avec lesquels il doit converser ? Ne s’agirait-il pas d’une provocation, d’un film de studio entièrement fait par IA ? Nous n’en serions que peu surpris en tout cas tant le tout vire au gloubiboulga indigeste et inintelligible, matérialiste, désincarné, où l’abscons ne semble pas masquer une réflexion plus intense que la seule maxime liée à l’inéluctable effondrement de notre civilisation, à la tragédie cyclique et répétitive – qu’il est ici détestable que Coppola situe lui aussi le centre du monde à New York d’ailleurs.

Surtout, l’ensemble nous apparaît totalement impersonnel, malgré la dédicace à sa femme Eléanore et malgré les quelques réflexions positives que le personnage interprété par Adam Driver (un super héros particulièrement énervant comme le sont tous les protagonistes de cette société du spectacle) porte, autour d’un prétendu bonheur apporté par son invention brevetée, un matériau bien étrange …

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