Mis à jour le 28 juillet, 2018
Présenté à Cannes en 2017 dans la sélection ACID, Le ciel étoilé au-dessus de ma tête est un film libre tourné en douze jours avec peu de moyens. Il émane de ce premier film de fiction d’Ilan Klipper une vraie volonté de proposition cinématographique. Cette comédie pop, voire punk, est assurément la marque d’un cinéaste à suivre de près.
Bruno a publié un fougueux premier roman en 1996. La presse titrait : « Il y a un avant et un après Le ciel étoilé au-dessus de ma tête ». Vingt ans plus tard, Bruno a 50 ans. Il est célibataire, il n’a pas d’enfants, et vit en colocation avec une jeune Femen. Il se lève à 14h et passe la plupart de ses journées en caleçon à la recherche de l’inspiration. Pour lui tout va bien, mais ses proches s’inquiètent…
À trente ans, Bruno publiait son premier roman, Le ciel étoilé au-dessus de ma tête, et devenait un écrivain à succès, véritable « coup de cœur de Jean d’Ormesson ». Vingt ans plus tard, aucun nouveau livre publié, en « manque de lien social » et d’inspiration, Bruno végète, victime de « la solitude de la tique ». Mais il peut compter sur « l’aide » interventionniste (mais pas le soutien) de ses parents et amis…
Ce premier long-métrage de fiction d’Ilan Klipper surprend. D’abord, son auteur était jusqu’ici connu en tant que documentariste, loin de la comédie dramatique névrosée dont descend Le ciel étoilé au-dessus de ma tête. Ensuite, le metteur en scène se refuse ici à tout académisme au risque de détourner son film d’un public rétif aux produits non formatés. Les libertés observées dans le montage technique et l’aisance perçue dans la gestion des variations de ton sont très prometteuses.
L’atmosphère décalée du film est installée dès la première scène. On y voit Bruno à la recherche d’une inspiration qui lui permettrait de griffonner quelques lignes d’un hypothétique second manuscrit. Laurent Poitrenaux prête corps et âme à son personnage. Il livre une remarquable et géniale composition entre hystérie et léthargie, drôlerie et névrose. En grand acteur de théâtre, il s’impose dans un casting composé essentiellement d’autres comédiens de théâtre. Et ce sont les élucubrations plus ou moins sensées de son personnage qui servent d’éléments moteurs à la narration jusqu’à un switch à mi-parcours qui rebattra les cartes entre Bruno et ses proches.
Point de ciel étoilé dans ce huis clos filmé dans l’appartement de Bruno. Cet autocentré névrotique et volubile y vit reclus. Ses parents, amis et voisins vont venir s’y entasser dans un joyeux brouhaha puisqu’« il faut sauver Bruno ! ». Les unités de lieu et d’action enfermées dans une temporalité serrée (le film dure moins de quatre-vingt minutes) confèrent au Ciel étoilé au-dessus de ma tête une certaine théâtralité. Le film pourrait d’ailleurs facilement être adapté en pièce de théâtre.
Mais Klipper livre bel et bien un film réjouissant dans le paysage cinématographique français du moment. La mise en scène et le montage des séquences usant de jump-cuts reflètent la psyché de Bruno victime des affres de l’inspiration. Fantasmes et réalités sont ainsi placés sur un même plan pour mieux brouiller les pistes. L’utilisation de filtres de couleur donne une touche pop à la comédie mise en images alors que la bande originale aux embardées punk achève de relever l’ensemble.
Quelques maladresses techniques et un récit qui s’étiole dans son final viennent à peine ternir une première œuvre de fiction prometteuse. Film fragile efusant nombre de compromis techniques, Le ciel étoilé au-dessus de ma tête brille de beaux éclats caractéristiques des vrais gestes de cinéma. Parfois dans un ciel étoilé, on voit passer une étoile filante. En voici une, à moins que ce ne soit un OFNI.
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