Mis à jour le 2 avril, 2017
D’abord, une bonne occasion s’est présentée. Puis vint la trahison.
Vingt ans plus tard, certaines choses ont changé, d’autres non.
Mark Renton revient au seul endroit qu’il ait jamais considéré comme son foyer. Spud, Sick Boy et Begbie l’attendent.
Mais d’autres vieilles connaissances le guettent elles aussi : la tristesse, le deuil, la joie, la vengeance, la haine, l’amitié, le désir, la peur, les regrets, l’héroïne, l’autodestruction, le danger et la mort. Toutes sont là pour l’accueillir, prêtes à entrer dans la danse…
Trainspotting est un film culte, et il le restera. Culte car furieux, drôle, inspiré, novateur, témoin d’une époque, se risquant à montrer et à dire ce que les autres voulaient taire. Il marqua les esprits de nombreux téléspectateurs qui le découvrirent bien après son exploitation en salle, et notèrent quelque part dans leur tête deux noms qu’ils avaient pu découvrir quelques années plus tôt dans petits meurtres entre amis, celui de Danny Boyle, le réalisateur, et celui d’Ewan Mac Gregor, l’acteur principal. Le second ne tardera pas à devenir l’une des plus belles promesses d’Hollywood, jusqu’à le propulser Jedi, puis étrangement, presque disparaître des hauts de l’affiche. Le premier aura très vite été annoncé comme un nouveau génie et tout aussi rapidement relégué au rang de ceux qui ont eu un coup de chance. Une vie moins ordinaire, qui suivait Trainspotting, quoi que plaisant et ambitieux subira les foudres d’une critique qui attendait un tout autre film. La plage ruinera la réputation de Danny Boyle. Danny Boyle renaîtra de ses cendres de façon aussi imprévisible que remarquée, grâce au toujours très ambitieux Slumdog millionnaire, auprès d’une nouvelle génération qui ne le connaissait pas. La cérémonie d’ouverture des jeux Olympique de Londres prouvera définitivement si besoin en était, que Danny Boyle compte réellement au rang des cinéastes capables de grandes prouesses, et donc doté d’un talent certain. Et ils ne sont pas si nombreux.
Que pouvait-on donc attendre de T2 Trainspotting ? Probablement, rien. Les suites sont très rarement de bonnes idées, surtout quand on s’attaque à des films cultes alors que l’horloge a tourné. Les bronzés III par exemple nous l’ont rappelé. Le temps qui passe change les énergies, les fulgurances. Les rocks stars connaissent aussi cette érosion énergétique, quand leurs œuvres jadis cultes, chargées, deviennent inéluctablement aseptisées, quand ils ne parviennent plus à transmettre par leur interprétation devenue trop mimétique l’énergie que leur oeuvre originelle recelait.
Un second souffle est toujours possible, mais il passe le plus souvent par une rupture, une remise en cause, une réinvention.
Trainspotting en soi a marqué par sa différence, s’il venait à être refait à l’identique, il ne marquerait pas tant. Si sa suite prenait le risque de proposer une nouvelle rupture, assurément, le projet serait voué à l’échec. 20 ans ont certes passé, mais le simple fait d’incorporer Trainspotting dans un titre fait naître de nouveaux espoirs, mais aussi de fortes attentes chez les spectateurs, et les critiques. Un pari similaire attend Denis Villeneuve prochainement avec Blade Runner II, pari qui n’est évidemment pas gagné d’avance.
Le défi consistait donc pour Danny Boyle à tout la fois se réinventer, plus précisément se ré-inspirer, en gardant une cohérence avec l’acte premier. Trainspotting se terminait de façon elliptique, ouverte, et quelque part laissait la place à l’espoir. Hyper mouvementé, aimant ses personnages, Trainspotting relève de l’esprit punk, sans futur tracé, que chacun peut interpréter comme il le souhaite, au degré qui l’intéresse: y voir un film léger ou au contraire un film engagé.
T2 Trainspotting ne fait nullement table rase du passé, bien au contraire, il n’a de cesse d’y faire référence. En ceci, il s’inscrit dans un passé et non dans un présent, l’énergie y perd terriblement.
En donnant à voir ce que chacun des personnages est devenu, il commet également un crime de lèse-majesté, il répond à une question que l’on ne voulait surtout pas se poser: Que deviendront-ils ? Toute la magie justement reposait dans le fait de ne pas avoir à se poser cette question là.
Une vérité s’imprime, elle prend le pas sur dix milles autres.
Qu’ils soient devenus autres, qu’ils aient ou non échappé à leurs destins, ils ne sont plus les personnages sans identité, sans repère, sans lois, qui courraient, se battaient, vivaient,et pour certains tombaient en chemin. Dit autrement, ils ne sont plus aussi libres, ils n’en portent plus le souffle, la rage.
Plus regrettable encore, les personnages interprétés par Robert Carlyle et par Ewan Mac Gregor sont devenus beaucoup plus lisses, beaucoup plus ordinaires.
La bande originale de Trainspotting participait pleinement de sa réussite, que ce soit en ce qu’elle était représentative d’une décennie, ouvrait des possibles ou transmettait des vibrations transcendantales- on pense notamment à Born sleepy d’Underworld.
Làs, T2 Trainspotting offre une bande son très ordinaire, qui là aussi, regarde beaucoup trop derrière elle.
T2 Trainspotting n’est ni furieux, ni drôle, ni inscrit dans son époque, ni novateur, ni risqué. Il donne à voir une suite presque prévisible, si ce n’est la très cinégénique Edimburgh à la configuration si étrange – l’architecture médiévale côtoyant l’architecture moderne- , si ce n’est une réalisation parfois très inspirée, aux plans adroitement obliques, qui nous font, par moment, oublier que la suite n’aurait préférablement du ne jamais exister.
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