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The smashing machine, le nouveau Rocky ?

Avec The Smashing Machine Benny Safdie livre un portrait à la manière de ce qu’aurait pu proposer Ferrara dans les 90, ou de ce qu’Aronofsky a plutôt réussi avec The Wrestler, en ce début de siècle, celui d’un héros fatigué, en proie avec ses démons, qui tente de lutter contre lui même, de lutter tout court, et qui peine à mener une vie pleinement réussie. Un portrait touchant qui se joue de la nature humaine, le héros l’amplifiant. Les pulsions de vie y cohabitent avec une pulsion de mort ou de destruction; les pulsions de vaincre, de se dépasser, s’inscrivent en contraste avec le besoin de tranquillité, de douceur, la recherche d’affection et de bonheur simple. Le héros au grand cœur, qui nous touchera pas sa tendresse, mais nous terrorisera par ses faiblesses, ses manquements à lui-même. Le sombre côtoie en permanence le plus clair, le passage permanent de l’un à l’autre; la descente aux enfers menace, mais le succès sportif tente de le faire oublier.

L’esthétique de Benny Safdie se fait moins clinquante que ce qu’il a pu faire auparavant (avec son frère), pour toucher plus juste. Efficace, relativement simple, la dramaturgie repose notamment sur la performance de Dwayne Johnson, métamorphosé (un rôle à Oscar !) en Mark Kerr dont il enfile parfaitement les gants. Les scènes violentes de combat quant à elles s’éparpillent, seule la deuxième partie du film leur accorde une part importante, dans une approche qui rappelle alors celle de Rocky et avant cela Raging Bull (le héros qui se relève à la sueur de son front), pour mieux poser le sujet de départ.

Quelque part, tout le monde pourrait se reconnaître en Mark Kerr. Safdie semble lui même être spectateur de catch libre, ancêtre du MMA, peut être la raison pour laquelle il n’hésite pas à accentuer la violence de certains coups, mais aussi à raccourcir les combats bien plus encore que les résumés sportifs ne le font. Surtout, il cherche à moderniser les valeurs transmises par Rocky en son époque, l’American dream ne laisse pas ici la place à l’American Nigthmare, brèche dans laquelle s’infiltrent nombre de réalisateurs indépendants exaspérés par la nature fallacieuse et ô combien réductrice du conte de fées: Safdie opte davantage pour une position « en même temps », dans laquelle les deux vont de pair, où l’humain peut tout à la fois gagner ou perdre, où gagner ne représente plus forcément la raison ultime. Ici Mark Kerr ne criera pas « Adrianne j’ai gagné » bien au contraire, le combat le plus dur qu’il mène ne s’inscrit pas forcément du côté du ring mais plutôt sur le terrain domestique. S’il veut pouvoir aimer et vivre en harmonie, un choix s’imposera à lui, pour pouvoir espérer crier victoire.

Malgré ses limites (la simplicité, l’écriture faiblarde du rôle confiée à Emily Blunt, l’absence de second plan ou d’intellectualisation, une certaine tendance à la répétition plutôt qu’à l’approfondissement), The Smashing Machine propose un divertissement honnête, bien porté entre autre par une musique jazzy d’ensemble qui laisse la place, en second plan, à d’autres morceaux plus rock’n’roll et en adéquation avec les aspirations du film (Springsteen, Rolling Stones) mais aussi de son titre (The smashing machine, non sans rappeler The Smashing Pumpkins), qui contribuent à son bon rythme. En cela, il nous rappelle le très électrique The Apprentice d’Ali Abassi.

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