Mis à jour le 26 janvier, 2021
Le festival 3 continents a par le passé consacré des réalisateurs de renom bien avant l’heure, tels Kore-Eda qui ne manque jamais l’occasion d’en toucher mot – notamment dans le livre Quand je tourne mes films récemment publié -, Hou Hsao Hsien, Jia ZhangKe ou Ashgar Farhadi. Son principe est simple et vieux comme le monde, traiter en long et en large du cinéma d’ailleurs, plus précisément de 3 continents parfois oubliés de nos grilles cinématographiques, l’Asie, l’Afrique et l’Amérique latine. En cela, le festival donne l’occasion de voyager, mais aussi de se cultiver. La compétition (9 films en sélection cette année) comporte tout à la fois des films de fiction, et des films documentaires.
Leur point commun ? Hors sentiers battus, les films empruntent très souvent des procédés de narration déroutants, souvent exigeants, qui rendent compte de l’état du pays, du temps qui s’y écoule … Le public du festival est réputé particulièrement curieux, ouvert sur le monde justement … et reconnaissons-le, pour certaines œuvres, cela est très justement nécessaire. Autre particularité, le festival fait le choix de ne faire aucun distinguo entre documentaires et fictions, la sélection en comporte à part égale.
Nous n’en sommes qu’à mi festival et n’avons pas pu voir l’ensemble des films en sélection, mais pour le peu qu’il nous a été donné de voir, le moindre que l’on puisse dire est que cette sélection comporte des films de factures très diverses, qui visent des publics très différents. Certains films font l’unanimité dans un sens où dans l’autre, voici nos avis en cours:
143 RUE DU DÉSERT de Hassen FERHANI Algérie, France, Qatar — 2019 | Non vu | ||
THE TREE HOUSE (NHÀ CÂY) de TRUONG Minh Quy Allemagne, Chine, France, Singapour, Vietnam — 2019 | – | Un film à l’approche documentaire, anthropologique, qui pourtant se pare d’une intention science-fiction. Nous serions sur Mars, mais la caméra nous montre le Vietnam le plus ancestral… Difficile de rentrer dans cette parabole à notre niveau… | |
PIQUEUSES de Kate Tessa LEE, Tom SCHÖN Allemagne, Île Maurice — 2019 | – | Un documentaire qui dés son départ livre ses intentions: plan fixe quasi interminable à l’intérieur d’un bus. Des images qui s’étirent, pour montrer un hors temps. Pas à nos goûts non plus | |
WHEN THE PERSIMMONS GREW (XURMALAR YETIŞƏN VAXT) de Hilal BAYDAROV Autriche, Azerbaidjan — 2019 | ** | Aspirations poétiques, références tarkovskiennes, sokhourovienne (la mère et le fils cité par le réalisateur), film artisanal centré sur une mère vivant hors temps, perpétuant la tradition, le film nous a plutôt divisé. L’élan poétique, visé, prend ou ne prend pas. | |
THE VALLEY OF SOULS (TANTAS ALMAS) de Nicolás RINCÓN GILLE Belgique, Colombie — 2019 | *** | Une beauté plastique manifeste, un joli sujet, un scénario bien ficelé, une interprétation sensible, un rythme certes lent, mais constant très étudié, la vallée des âmes fascine aisément et se regarde très plaisamment. | |
AU CŒUR DU MONDE (NO CORAÇÃO DO MUNDO) de Gabriel MARTINS, Maurílio MARTINS Brésil — 2019 | * | Une première plongée dans le Brésil provincial qui nous laisse croire à une fiction intime mais qui très vite laisse place à une intrigue maladroite, sans véritable allant. Ce Braquage à la brésilienne, qui tente un mariage improbable entre thriller ralenti et documentaire ne nous a pas véritablement séduit | |
HEIGHT OF THE WAVE (PA-GO) de PARK Jung-bum Corée du Sud — 2019 | Non vu | ||
NO.7 CHERRY LANE (JI YUAN TAI QI HAO) de Yonfan Hong Kong SAR, China — 2019 | **** | On l’avait découvert et beaucoup apprécié à Venise, on ne s’y était pas trompé le film trouvait place au palmarès | |
LA FEMME DES STEPPES, LE FLIC ET L’ŒUF (ÖNDÖG) de WANG Quan’an Mongolie — 2019 | **** | Une photographie sublime, très étudiée, une intrigue qui se développe de façon presque sur-réaliste, on se croirait par instant dans « Il était une fois en Anatolie » de Nuri Bilge Ceylan … Brillant, assurément. |
Aux côtés de cette sélection exigeante, le festival propose chaque année des focus qui permettent de remontrer certaines œuvres, de développer un point de vue transverse. Cette année, trois thématiques ont été retenues.
La première s’intitule « le livre noir du cinéma américain« , il s’agit d’une collection de films très variés qui traitent de la question du Noir américain, d’une façon ou d’une autre. Ainsi cohabitent des œuvres phares de Spike Lee, Melvin Van Peebles, John Singleton, Charles Burnett ou Larry Clark (les deux derniers sont présents à Nantes), des films de la blacksploitation avec des films muets des années 20. On peut dire qu’il y en a pour tous les goûts, des pépites à découvrir ou à revoir,plus de 30 films !
THE SYMBOL OF THE UNCONQUERED: A STORY OF THE KU KLUX KLAN de Oscar MICHEAUX États-Unis — 1920 | |
WITHIN OUR GATES de Oscar MICHEAUX États-Unis — 1920 | |
THE SCAR OF SHAME de Frank PERUGINI États-Unis — 1927 | |
FIELDWORK FOOTAGE de Zora NEALE HURSTON États-Unis — 1928 | |
BIRTHRIGHT de Oscar MICHEAUX États-Unis — 1939 | |
DIRTY GERTIE FROM HARLEM U.S.A. de Spencer WILLIAMS États-Unis — 1946 | |
MIRAGE DE LA VIE de Douglas SIRK États-Unis — 1959 | |
THE INTRUDER de Roger CORMAN États-Unis — 1962 | |
THE COOL WORLD de Shirley CLARKE États-Unis — 1963 | |
NOTHING BUT A MAN de Michael ROEMER États-Unis — 1964 | |
SYMBIOPSYCHOTAXIPLASM: TAKE ONE de William GREAVES États-Unis — 1968 | |
LES SENTIERS DE LA VIOLENCE (THE LEARNING TREE) de Gordon PARKS États-Unis — 1969 | |
SHAFT, LES NUITS ROUGES DE HARLEM (SHAFT) de Gordon PARKS États-Unis — 1971 | |
SWEET SWEETBACK’S BAADASSSSS SONG de Melvin VAN PEEBLES États-Unis — 1971 | |
AS ABOVE, SO BELOW de Larry CLARK États-Unis — 1973 | |
GANJA & HESS de Bill GUNN États-Unis — 1973 | |
MEDEA de Ben CALDWELL États-Unis — 1973 | |
THE HORSE de Charles BURNETT États-Unis — 1973 | |
WATTSTAX de Mel STUART États-Unis — 1973 | |
FOXY BROWN de Jack HILL États-Unis — 1974 | |
BUSH MAMA de Hailé GERIMA États-Unis — 1975 | |
PASSING THROUGH de Larry CLARK États-Unis — 1977 | |
KILLER OF SHEEP de Charles BURNETT États-Unis — 1978 | |
MOSES SISTERS INTERVIEW de Pearl BOWSER États-Unis — 1978 | |
RAIN (NYESHA) de Melvonna BALLENGER États-Unis — 1978 | |
KILLING TIME de Fronza WOODS États-Unis — 1979 | |
FANNIE’S FILM de Fronza WOODS États-Unis — 1981 | |
ASHES AND EMBERS de Hailé GERIMA États-Unis — 1982 | |
LOSING GROUND de Kathleen COLLINS États-Unis — 1982 | |
SUZANNE, SUZANNE de Camille BILLOPS, James HATCH États-Unis — 1982 | |
BLESS THEIR LITTLE HEARTS de Billy WOODBERRY États-Unis — 1983 | |
MY BROTHER’S WEDDING de Charles BURNETT États-Unis — 1983 | |
DO THE RIGHT THING de Spike LEE États-Unis — 1989 | |
SIDEWALK STORIES de Charles LANE États-Unis — 1989 | |
BOYZ’N THE HOOD, LA LOI DE LA RUE de John SINGLETON États-Unis — 1991 | |
DAUGHTERS OF THE DUST de Julie DASH États-Unis — 1991 | |
JUICE de Ernest R. DICKERSON États-Unis — 1992 | |
MENACE II SOCIETY de Albert HUGHES, Allen HUGHES États-Unis — 1993 | |
I AM NOT YOUR NEGRO de Raoul PECK États-Unis — 2016 | |
GET OUT de Jordan PEELE États-Unis — 2017 | |
THE HATE U GIVE – LA HAINE QU’ON DONNE de Georges TILLMAN JR. États-Unis — 2017 |
Autre thématique visitée cette année, le cinéma costaricain, que beaucoup découvriront.
Enfin, le directeur artistique du festival, Jérôme Baron a tenu cette année à mettre à l’honneur la filmographie de Tsui Hark, un auteur dont la plupart des films n’ont pas atteint le continent européen, qui allient action et esthétique.
Le festival propose également des avants-premières, comme l’excellent Nina Wu de Midi Z qui était à Cannes cette année et dont nous reparlerons (des places à gagner bientôt).
D’un point de vue pratique, sachez que le festival souffre de quelques désagréments … Le festival qui bénéficiait, il y a quelques années, d’un certain lustre, semble ne pas vouloir se moderniser, ou croître. Si, en général, vous rentrerez en salle sans trop d’encombres, cela est cependant sans aucune garantie … Pour exemple, nous nous pressions un matin pour redécouvrir la copie restaurée [d]es fleurs de Shanghai – deux heures de route, réveil à 6h30 du matin, motivés ! – , la température extérieure n’étant pas très agréable, nous prîmes un café qui nous fut fatal, la séance fut annoncée complète – eh oui aux 3 continents la presse n’a aucune priorité !- en lieu et place du chef d’oeuvre incontesté de Hou Hsao Hsien nous dûmes nous contenter du contestable chef d’oeuvre Sweet sweetback’s baadasssss song de Van Peebles, à l’esthétique et au rythme, disons-le, totalement opposés de ceux des fleurs de Shanghai. Si vous vous y rendez donc, et que vous visez un film en particulier, prenez de la marge, et pas de café ! Le plus gênant dans l’histoire est que chaque film proposé n’est diffusé que deux fois, ce qui fait qu’un festivalier ne peut au mieux que voir que 15% de la sélection, ce qui reste très peu !
Dernier conseil éclairé, évitez la restauration sur place à l’espace Cosmopolis, plus que quelconque.
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