Hélène Cattet et Bruno Forzani se livrent avec Reflet dans un diamant mort à un exercice essentiellement technique, notamment un très bel exercice de montage, qui privilégie des transitions par la sensation, et forment ainsi une grammaire singulière. Maniéré, voire maniériste, le film recycle le mythe du film d’espionnage, s’en accapare quelques codes, et les remixe, entre giallo et hommage appuyé, entre Bande dessinée et cinéma expérimental, voire nanardesque, dans la plus pure démesure, entièrement assumée, tant le projet repose sur son ambition esthétique.
La plus belle réussite se situe dans cette idée de proposer un cinéma matière, qui ne s’intéresse non pas tant au toucher comme pouvait le faire par exemple Jan Švankmajer (Les conspirateurs du plaisir) mais aux reflets, que ce soit des éclats de diamants sur des seins, des robes métalliques, des miroirs ou des boules à facette, en lien avec un décor de mer aux reflets d’argent. L’esthétique, de tout son long, porte un nom: D.I.S.C.O comme dit la chanson. Mais pour le reste, c’est à dire le fond, hélas, les bonnes idées manquent, comme si tout le budget était passé dans la décoration :-). Le synopsis suffit à lui même pour annoncer tout ce qui nous sera donner à penser, seule l’expérience visuelle vaut le détour, même le jeu très statique de Yannick Rénier, pourtant excellent dans d’autres registres, ne relève quoi que ce soit, pas plus que la présence de Maria de Medeiros au générique. Le concept « narratif » enferme littéralement le spectateur dans un récit à l’arrêt dans ses deux premiers tiers, s’égarant comme son personnage principal, dans des flashback subliminaux, désordonnés, irréels, en tant que souvenir, qui plus est transformé par une mémoire défaillante, mais tout autant irréels puisque fabriqués sur la base de références visuelles des années 70, une vision fantasmée et sublimée du métier d’espion, qui alimenta tant de récits, de films et de légendes. Le principe de confronter le présent de ce vieil espion dans une résidence hôtelière luxueuse, où la mort l’attend peut être, à son passé, agité, communiquent deux énergies très contraires, l’une statique, où chaque jour (chaque lever ou coucher de soleil) précède le suivant sans grande différence, et l’autre, étrangement, tout aussi statique, où chaque souvenir d’action rempile sur un autre souvenir, très proche, sans réel développement, façon nouvel épisode d’une série répétitive. Quand enfin dans son dernier tiers le film déborde de sa mise en place, quitte son motif pour relier le présent et le passé, basculer dans une action au présent, hélas, cette impression de vacuité nous poursuit, le passé déformé ne fait que produire un énième motif, toujours aussi répétitif, ne nous délivrant aucunement du profond ennui dans lequel le film, malgré ses réelles qualités visuelles, malgré toute la sympathie que l’on porte à l’essai, nous aura plongé.
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