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Maria de Pablo Larraín

Mis à jour le 30 août, 2024

Un film de Pablo Larraín

Avec: Angelina Jolie, Pierfrancesco Favino, Alba Rohrwacher, Haluk Bilginer, Kodi Smit-McPhee, Valeria Golino, Stephen Ashfield, Alessandro Bressanello, Rebecka Johnston, Botond Bartus

1977 : Maria Callas, autrefois la plus grande diva d’opéra du monde, vit recluse à Paris avec son personnel et ses deux caniches. Sa santé se dégrade de plus en plus. C’est alors qu’elle reçoit une demande pour repartir en tournée. La Callas chantera-t-elle à nouveau ? Et si oui, pour qui ?

Pablo Larrain revient à un format qui lui est cher, et s’inscrit tout en continuité et cohérence avec ses projets précédents. Le personnage de Maria Callas fait écho à Jackie (Kennedy) plus qu’à Neruda, mais puisqu’il s’agit de raconter une époque, un art, et une personne tout à la fois, l’un des enjeux principaux qui s’est présenté au réalisateur argentin consistait à trouver son angle d’attaque, narratif. Il opte ici, comme pour Neruda, par un procédé d’ordre surréaliste, convoquant un fantôme démon, un certain Mantrax, médicament hallucinatoire qui devient ici le journaliste confident de la Diva, dit autrement, le média entre le spectateur et la représentation que Larrain se fait de la Callas. L’idée assurément valait le projet, à l’instar de ce Gainsbarre en marionnette qui permettait à Joan Sfar d’évoquer avec une certaine douceur la part sombre de Gainsbourg, ses démons. Mais ici, Larrain, instaure très rapidement une atmosphère par trop annoncée, dystopique, centrée non pas sur Maria, la personne, finalement peu sur La Callas, l’artiste et son rapport à son art, mais bien davantage sur un état cauchemardesque, une traversée du styx médicamenteuse, des personnages secondaires présents mais impuissants aux côtés de la star à la dérive, et un peu aussi, une époque révolue ou qui commence à s’effondrer. Il s’empare d’une légende, et de ses clichés, qui viendront nourrir, par tableau, un récit par trop épurée, et particulièrement distant. Mises en premier plan, la grandiloquence de la mise en scène, et les chorégraphies maîtrisées, propres au cinéma de Larrain, tout autant que l’interprétation maniérée d’Angélina Jolie(nous aurions aimé une incarnation) valent matière, prédominent jusqu’à occulter le récit intime, voire le personnage tout entier. Il ne s’agira que de spectacle, de représentations, de vagues à l’âme, mais très peu de réel. Larrain se perd dans son concept même, son aller retour permanent entre fantasmes et souvenirs, vire rapidement à la profusion confuse, et parfaitement stérile. Là où le procédé aurait pu viser à un rapprochement, il nous tient à distance, la faute à des dialogues parfois extraordinairement communs, parfois faussement énigmatiques, mais jamais intellectuels, la faute à une monotonie assumée, qui épouse le désenchantement de la star incapable de revenir sur scène, de chanter, ni même de vivre, la faute à une part biographique bâclée, qui s’appuie sur des stéréotypes – Larrain nous semble très loin de connaître la Callas lui même, ou de s’être entouré dans son travail d’écritures de personnes qui aurait pu l’en rapprocher. Même la part psychiatrique – ou psychologique- du récit manque de vérité, de réel, là aussi Larrain semble nous parler de quelque chose qu’il observe de très loin, tel un quidam qui apprend par voie de presse qu’une idole consommait de manière addictive des médicaments – sujet qui, s’il avait été pris à bras le corps et non sous l’angle d’une quasi renonciation du personnel domestique à ce sort, avait de quoi largement réhausser le récit. Prévisible et froid, l’objet ici proposé manque cruellement d’un regard, d’inspirations, d’envolées, malgré la flamboyance d’ensemble, et la tentative lyrique. La part d’ombre, les démons de La Callas se prêtaient à un tout autre développement, plus analytique, plus fouillé, plus malin et incarné, que cet exercice de style, ce requiem somme toute vain et quasi inerte.

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