Mis à jour le 31 août, 2024
Un film de Ludovic Boukherma, Zoran Boukherma
Avec: Paul Kircher, Angelina Woreth, Sayyid El Alami, Gilles Lellouche, Ludivine Sagnier, Anouk Villemin, Louis Memmi, Anaïs Demoustier, Louise Lehry, Christine Gautier
Août 1992. Une vallée perdue quelque part dans l’Est, des hauts-fourneaux qui ne brûlent plus, un lac, un après-midi de canicule. Anthony a quatorze ans, et avec son cousin, pour tuer l’ennui, il décide de voler un canoë et d’aller voir ce qui se passe de l’autre côté, sur la fameuse plage des culs-nus. Au bout, ce sera pour Anthony le premier amour, le premier été, celui qui décide de toute la suite. Ce sera le drame de la vie qui commence.
Notre avis 1: ***
Les frères Boukherma (Ludovic et Zoran) proposent un travail d’une puissance inattendue. Un film ambitieux qui respire le cinéma; avec un très bon sens du rythme, de la dramatisation, du cadrage, et une bonne utilisation de la musique (riche et jouissive bande son composée de morceaux phares des années 1990). Surtout, ils savent sous quel angle regarder chaque personnage, sur quels détails appuyer, comment dégager du rêve et de l’amertume, comment créer un « moment inoubliable » à partir d’un geste simple, comment raconter une histoire sur un temps long, comment remplir chaque scène d’un maximum de force, de cruauté, de beauté. Basé sur le roman de Nicolas Mathieu, le film dessine le portrait d’un milieu, d’une société, traite un sujet social important (encore plus important aujourd’hui, politiquement parlant) par un ton grave, épique, sublime.
Notre avis 2: **(*)
Cette production française a assez gros budget présente bien des défauts qui d’ordinaire nous rebutent et l’emportent sur tout autre jugement. Une facture grand public, un acteur principal (Paul Kircher) sans charisme voire déplaisant, qui désert totalement le personnage, des choix musicaux populaire, parfois même franchouillard qui nous rappellent la cérémonie d’ouverture des jeux olympiques, une scène finale pénible, qui nous semble sortie de nulle part – et à contre-sens de la note principale du film, une accélération soudaine de la dramaturgie dans le deuxième tiers qui ne prend pas, des anachronismes dans la reconstitution de l’époque (une bière 8 6 par exemple qui traîne par ci, par là, des expressions qui n’existaient pas encore à l’époque, …). Oui, mais voilà, à côté de cela, la grosse machine prend, au contraire par exemple de l’Amour Ouf de Gilles Lellouche que l’on inscrit volontiers dans la même catégorie (et qui lui a de bons choix musicaux, un peu moins mainstream). Elle prend rapidement, par la douceur de l’image, la mélancolie de tous les plans, la qualité colorimétrique et l’élégance des mouvements de caméra et des transitions, la parfaite utilisation de la musique pour rythmer l’histoire, voire la nourrir d’un sens caché (on se surprend même à trouver un sens à une chanson de Cabrel !), le très bon casting hormis Kircher (Gilles Lellouche, lui encore, très bon dans son rôle de beauf violent, Ludivine Sagnier très intéressante également en maman protectrice un peu dépassée, mais aussi tout le casting adolescent, en enfin l’inscription du film dans un territoire, qu’il soit géographique (Epinal, les lacs vosgiens), social (les faubourgs, la frange populaire mais aussi la bourgeoisie locale en contraste, le rapport à l’emploi, les premières vagues d’immigration et la cohabitation), mais aussi cinématographique (le récit d’apprentissage, le film d’adolescent doux-amer, la fresque romantique et le western !). Une étonnante réussite donc, d’autant que les frères Zoukherma avaient séduit quelques uns d’entre nous (nous étions divisé) dans un style bien différent, avec Teddy.
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