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Ari de Léonor Serraille

Mis à jour le 21 février, 2025

Un film de Léonor Serraille

Avec: Andranic Manet, Pascal Rénéric, Théo Delezenne, Ryad Ferrad, Éva Lallier, Lomane de Dietrich, Mikael-Don Giancarli, Clémence Coullon

Ari, 26 ans, réussit enfin son concours de l’enseignement. Neuf mois plus tard, professeur des écoles stagiaire dans une école maternelle lilloise, il craque nerveusement en pleine séance malgré le soutien constant de Blanche, la directrice. Il se retrouve à l’hôpital et un médecin lui signe un arrêt de travail. Son père, en colère de le voir faillir, le chasse du nid familial qu’il n’a jamais quitté. Fébrile et ébranlé, traversé de visions étranges, Ari erre dans la ville et se lance malgré lui dans une suite de retrouvailles.

Leonor Serraille revient à un matériau intime, très personnel et quelque peu singulier, malgré son universalisme, pour nous proposer un étrange objet. Ari naît d’une fascination pour l’oeuvre (et la vie) d’Odilon Redon, plus globalement pour un vif intérêt pour la peinture, l’effet quel produit sur l’âme et réciproquement. Pour s’être interrogée de longues minutes et à de nombreuses reprises devant le tableau L’homme endormi de Caroolus-Duran (exposé au palais des beaux-arts de Lille), et son pouvoir médiatique, une évidence est née dans l’esprit de la jeune réalisatrice française, celle de nous proposer une variation (inconsciente) de Jeune Femme, en proposant cette fois-ci une trajectoire qui s’interdise toute trivialité et ose parler simplement de choses simples, la difficulté de vivre un deuil, de se sentir rejeté, la difficulté de vivre et de se confronter au regard des autres, la difficulté de trouver sa voie, la difficulté de s’exprimer librement et d’évoquer ce que l’on a sur le cœur, sans blesser autrui, juste pour rétablir un équilibre, la difficulté de se relever, malgré toutes les idées noires qui peuvent parfois traverser l’esprit quand les vents sont contraires. Jeune Femme s’appuyait fortement sur Sue Perdue dans Manhattan, c’est dire, si malgré toute la pétillance de Laetitia Dosch et l’énergie qu’elle apportait à son personnage Paula, en perdition psychologique, sur le point de craquer, mais qui parvenait à faire de son malheur sa force – nous ne pouvions qu’entrer en empathie avec un personnage si libre – un message diffus autour de l’existence traversait déjà l’esprit de Leonor Serraille, qui, pour autant, ne partageait pas la vision totalement désabusé de Kolek qui n’épargnait rien au sort de Sue, de façon fataliste. Au contraire, Paula refusait la fatalité, et bien au contraire, elle s’en remet à sa bonne étoile, croit en ses chances, rebondit intérieurement, croit en elle, dans les autres, en son destin, aux évènements extérieurs bénéfiques. Kolek en jouait, laissant entrevoir la lumière au pire des instants, pour mieux frapper le spectateur quand le verdict final tombe. Ce constat mrobide, cette éventualité d’une existence dont les rêves seraient briser les uns après les autres, Serraille le réfute, fermement, et nourrit en elle une grande foi non dans le présent, mais dans l’avenir. Ainsi, Redon se mit à peindre son deuxième fils, vivant quand son premier décéda, en couleur quand l’ensemble de ses peintures précédentes versaient dans le sombre. Ce retour à la lumière, ce retour à la lumière, le destin qui prend sa revanche, voilà le sujet d’Ari, et il ne restait plus qu’à construire un personnage qui en soi le reflet, et qui n’emprunte plus cette fois à la personnalité de Laetitia Dosch (Paula ressemblait à Leonor Serraille dans son parcours, mais non pas dans son caractère) mais traduise quelque chose de profond appartenant à la réalisatrice, et qui, se lance ici le défi de parler à cœur ouvert, comme peut le faire un enfant, qui ne se pose la question de son image, mais s’exprime simplement, livre son ressenti, nécessite les autres, cherchent leur regard, et plus encore qu’un adulte, montre qu’il a besoin d’être aimé, et d’aimer. Voici un premier point de départ, et le film ouvrira par une scène très explicite, en très gros plans, montrant l’importance pour un enfant, mais aussi pour une mère, de se témoigner l’un pour l’autre une infinie tendresse, mais aussi levant dés le départ sur la question que le spectateur se serait sans cela poser tout le long du film, pourquoi ce prénom Ari ? De l’aveu de Léonor Serraille, il n’importait pas qu’Ari soit un garçon ou une fille, l’état d’esprit précis que le film intente de traduire à l’écran, la tranche de vie narrée, touche à l’universelle et peut tout aussi bien concerner un homme ou une femme. L’homme endormi, l’homme qui a laissé son cœur sortir de son corps, qui a perdu son âme d’enfant, peut à tout instant se réveiller.

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