Mis à jour le 1 septembre, 2025
Un film d’Olivier Assayas
Avec: Paul Dano, Jude Law, Alicia Vikander, Tom Sturridge, Jeffrey Wright, Zach Galifianakis, Andris Keišs, Anton Lytvynov, Will Keen, Matthew Baunsgard
Russie, au début des années 1990, au lendemain de l’effondrement de l’URSS. Dans un nouveau monde qui promet la liberté et flirte avec le chaos, un jeune artiste devenu producteur de télévision, Vadim Baranov, devient de manière inattendue le spin doctor d’un membre prometteur du FSB (ex-KGB), Vladimir Poutine.
Notre avis: (*)
Le Mage du Kremlin d’Olivier Assayas devait s’inscrire dans les pas de Limonov, le livre voire son adaptation cinématographique un peu trop partielle de Serebrennikov, en tout cas, que ce soit le synopsis, la collaboration à l’écriture et même le caméo d’Emmanuel Carrère, et la symétrie de destins entre Limonov et Baranov, inspiré de Vladislav Sourkov dans la vraie vie, de l’art à la politique, tout le laissait penser. Mais rapidement, et malgré ce premier tiers un peu rock’n’roll qui cherche à rendre compte, de manière certes très convenue, du vent de liberté et du chaos qui suivit la perestroika dans les années 90, sous Eltsine, un président qui faisait honte à son peuple par ses excès alcooliques, nous commençons fortement à douter du caractère épique du film, de sa précision, et même de ce qu’il aurait à nous révéler. On vient même à craindre que le portrait très fade du très fade Baranov, ne serve de subterfuge pour nous parler de Poutine, ce qui en soi eut été louable, si tant est qu’il y eut un développement du côté littéraire, si l’art politique de Baranov, présenté comme une éminence grise dans le texte et le synopsis mais montré à l’écran en valet sans valeur, nous avait été mis en perspective de ce qui sert de point de départ à une rencontre entre un journaliste américain à la voix off pénible de tout son long, et Baranov, les écrits de Zamiatine dont Baranov et le journalise partagent la passion. De Zamiatine, nous n’apprendrons rien d’autre qu’il fut un opposant de Staline, de la grandeur de sa pensée nous n’aurons le droit qu’à de faux semblants, à des admirations prononcées par les deux personnages qui se rencontre. Cette rencontre auquel on ne croit guère, sert de structure au film, le retiré Baranov aurait quelque chose à nous dévoiler de Poutine, quelque chose de secret. Et ce secret, il chercherait donc à le transmettre, on ne sait pour quelle raison, en version très longue à notre journaliste américain arrivé là comme un cheveur sur la soupe. Nous tairons le fait que le film ne peut fonctionner de base en choisissant la langue anglaise de tout son long (même Poutine, singé par Jude Law parle anglais), il y aurait là un point de vue subjectif à rejeter le film pour cette seule raison, mais nous décelons très rapidement, et jamais cette impression ne nous quittera que le film tourne autour de lui même, qu’il respire le faux de A à Z. Les grands spécialistes des thrillers politique (Gavras, Stone, Lumet, Pakula, …) se distinguent par leur capacité à rendre audible ce qui ne l’est pas, à faire ressortir la tension et les enjeux par leur sens du réel, la précision de leur documentation, la force de leur dialogue, et la puissance de leur regard, de leur compréhension de ce qui se joue dans la sphère politique, des mécanismes en place. Assayas, lui, n’a jamais caché son goût pour le cinéma américain, et ses tentatives de film d’action ont le plus souvent aboutis à des films médiocres. Le Mage de Kremlin n’y fait pas exception, il mise tout sur la sensation, la sensation de révéler un secret et de tenir un discours intelligent. Tout concoure à intensifier cette sensation. Et de fait, rien ne nous sera révélé, le film multipliant les dialogues ineptes, de façon extrêmement bavarde, et manipulatrice. Par ce que nous ne comprendrions pas tel ou tel aphorismen nous devrions en percevoir la puissance de penser, y voir de l’intelligence. D’autres réalisateurs américains contemporains usent également de cette technique (Nolan par exemple ou Fincher, qui à l’instar d’Assayas ne nous apprit que très peu sur Zuckerberg). Puisque le grand mystère n’est pas, puisque les évènements politiques sont ramenés à leur plus simple expression et balayés au détour d’une conversation de salon, puisque le portrait de Poutine et de Baranov vire à l’accumulation de clichés sans profondeur, nous ne pouvons que constater que Le MAge du Kremlin est un film qui ne sert pas à grand chose, et qui verrait trouver sa place aisément dans les collections futures de plateformes à la Netflix qui aiment multiplier les projets qui du vide font du vide..
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