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Madame Bovary, une adaptation non sans intérêt

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Madame Bovary a déjà été adapté au cinéma à de nombreuses occasions. D’emblée, on pense notamment à l’interprétation d’Isabelle Huppert dans le film de Claude Chabrol, Madame Bovary, mais celle-ci est loin d’être la seule. On compte en effet dix-huit adaptations en France et dans le monde entier : en Pologne, en Angleterre, en Allemagne, au Portugal, en Argentine, en Russie, aux États-Unis ; même Bollywood a tenté de mettre à l’écran une oeuvre pourtant très difficile à adapter ! Ainsi, nous pouvons vous citer  La Fille de Ryan (1970) de David Lean (Grande-Bretagne), Sauve et protège (1989) d’Alexandre Sokourov (Russie), Madame Bovary (1949) de Vincente Minnelli (États-Unis),  mais aussi Val Abraham (1993) de Manoel de Oliveira (Portugal), qui s’éloigne assez notablement de l’intrigue principale, La Fille de Ryan (1970) de David Lean (Grande-Bretagne). Voici une liste plus complète:

Sophie Barthes © LeMagCinema 2015

Alors, quelle mouche a donc piqué Sophie Barthes, que l’on ne connaît que très peu, pour s’attaquer à un tel sujet ? En conférence de presse à Deauville, toutes les personnes présentes n’avaient que cette question à la bouche. Et la réponse fut simple, quasi cinglante: « On me l’a proposé  et le défi m’a intéressé ».

Alors quel intérêt peut-il y avoir pour le spectateur, si ce n’est de se remémorer l’histoire d’un des plus grands classiques français et de se replonger dans le récit ?

Eh bien justement, l’intérêt réside précisément dans le récit, dans le talent narratif de Flaubert, dans son aspect visionnaire, et dans ce qu’il reste à découvrir du roman. Et Sophie Barthes s’en sort plus qu’honorablement et offre un écrin tout à fait convenable, comme nous le tweetions …

Convenable est ici bien entendu à prendre au sens propre, et non de façon péjorative. L’exercice est particulièrement périlleux, difficile.

La forme doit s’effacer, c’est une obligation manifeste, le fond doit ressortir. Pour la forme, le choix des belles lumières automnales, des clairs obscurs cévenols, des contrastes forts, des costumes aux couleurs chatoyantes est particulièrement appréciable. Outre la facture très classique, très propre et agréable, encore une fois au sens propre, ces éléments pris un à un, forment un tout avec le récit, cohérent avec celui-ci. Mia Wasikowska, elle même, est très crédible et toute en retenue dans son jeu.

Sur le fond, le récit de Flaubert brasse plusieurs thématiques, plusieurs réflexions. Avant tout, le roman dresse un portrait de femme, moderne, mais aussi le portrait d’une époque, qu’il abhorrait.  Flaubert montre l’ennui, traduit la langueur, et sans pour autant le souligner, livre quelques pistes explicatives, quelques réflexions. Les conventions, les habitudes provinciales, les rapports à la consommation, le rapport (ou plus exactement son absence) à l’art, sont parmi celles-ci. Flaubert sait aussi, tout aussi styliste fut-il, faire preuve d’un sens de l’observation et de la psychologie affiné, pour ce qui est de transcrire étape à étape l’étiolement d’une femme qui peu à peu perd ses repères, se désillusionne et perd goût à la vie. Elle est victime des autres, en premier lieu de la médiocrité, de l’immondice et de la lâcheté masculine, mais aussi d’elle même.

Sophie Barthes reprend ses éléments, reprend la trame principale, mais s’intéresse à une période plus courte, plus précisément au caractère dispendieux d’Emma Bovary, s’autorise des libertés avec le récit. Elle choisit un rythme plus soutenu, et choisit de développer la relation qui unit la jeune femme avec l’un de ceux qui fera son malheur, celui qui la rapproche de la ville et de ses divertissements, le marchand.

Intéressant et dans l’ensemble réussi, le film aurait pu trouver sa place au palmarès du festival de Deauville.

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