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Zero Theorem: le nouveau Brazil ?

Londres, dans un avenir proche. Les avancées technologiques ont placé le monde sous la surveillance d’une autorité invisible et toute-puissante : Management. Qohen Leth, génie de l’informatique, vit en reclus dans une chapelle abandonnée où il attend désespérément l’appel téléphonique qui lui apportera les réponses à toutes les questions qu’il se pose. Management le fait travailler sur un projet secret visant à décrypter le but de l’Existence – ou son absence de finalité – une bonne fois pour toutes. La solitude de Qohen est interrompue par les visites des émissaires de Management : Bob, le fils prodige de Management et Bainsley, une jeune femme mystérieuse qui tente de le séduire. Malgré toute sa science, ce n’est que lorsqu’il aura éprouvé la force du sentiment amoureux et du désir que Qohen pourra enfin comprendre le sens de la vie…

Terry Gilliam revient avec Zero Theorem à un genre, la science fiction, qui lui a valu – Brazil – son plus grand succès, sa plus grande renommée, l’essentielle de sa réputation (même si Les aventures du baron de Münchaunsen, Las Vegas Parano, et bien sûr les films réalisés par Les Monthy Python sont cultes également).
C’est peu dire que Zero Theorem était très attendu, plus attendu peut être encore que sa version de Dom Quichotte. D’aucuns l’auraient vu sacré en compétition à la dernière Mostra de Venise sans même l’avoir vu … Las, le palmarès fut tout autre …
Comparé Zero Theorem à Brazil, outre le genre, semble une évidence lorsque l’on entend Terry Gilliam lui même décrire son film comme la version actuelle de l’idée qu’il se faisait de l’humanité sociale, de nos jours, en réponse à la vision qu’il pouvait en avoir lorsqu’il écrivait Brazil. Ne nous y trompons cependant pas, Terry Gilliam, une fois n’est pas coutume, n’a pas écrit lui même son scénario, le déléguant à Pat Rushin, « D’entrée de jeu, le script m’a plu. Il était très bien écrit, et les dialogues et les personnages étaient très convaincants. D’ailleurs, je me suis senti en terrain connu dès la première lecture. Certaines parties me rappelaient L’armée des douze singes et certains autres de mes films … » dira-t-il. Ceci ne l’empêchera pas d’y mettre sa touche personnelle, comme le confirme Pat Rushin: « par exemple, j’avais écrit une scène de fête, qui était assez banale. Terry en a fait une soirée à thème – l’Afrique en l’occurrence – qui a lieu dans une vieille maison dont l’un des occupants déménage, si bien qu’il y a des cartons un peu partout. Je me suis dit que c’était vraiment malin, car dès lors, il n’avait pas besoin de meubler l’espace. Je suis peut-être capable d’écrire une scène de fête, mais Terry, lui, sait faire la fête !« .


Si l’on retrouve à l’affiche, de façon assez anecdotique les stars Matt Damon et Tilda Swinton, les deux rôles principaux sont dévolus à Christopher Waltz, dont la filmographie n’a de cesse de se se développer, ici très transformé, cheveux rasés, et parfait dans un rôle d’hyper névrosé, et à Mélanie Thierry, que Terry Gilliam utilise comme un élément perturbateur, une image, un symbole, un remède.

Le propos, tout comme celui de Brazil est plutôt abscons, l’univers proposé semble bureaucratique, étrangement organisé, la vision de la société du future détonne; elle est toute à la fois familière et originale. Familière, car Gilliam s’amuse à étendre les tendances actuelles, à proposer un monde où chacun s’habille le plus librement du monde, où les publicités envahissent bien plus encore qu’elles ne le font aujourd’hui l’espace public, où la couleur remplace partout le noir et blanc, où le ringard ringardise le monde actuel. Cet univers composé de voitures qui ne sont nullement futuristes- bien au contraire, ce sont de petites smart- est également composé de personnages, qui ne sont ni chirurgiés, ni robotisés. Vous ne trouverez ici nul extra-terrestre aux formes singulières issues de laboratoires 3D qui détiennent les clés de l’imaginaire de Star Wars, en passant par le Cinquième Element, même Blade Runner ou toute autre production futuriste. Bien au contraire, vous y trouverez des machines qui semblent sorties tout droit de Brazil, des ordinateurs qui ne sont pas miniaturisés, qui font la part belle à une mécanique qui n’est pas loin de rappeler les cartes perforées, des fluides fluorescents qui semblent prendre place dans le quotidien de nos personnages, telles une énergie vitale, des psychologues virtuelles programmées et programmables aisément par un geek à tout faire, des trips psychologiques et connectés.: Kitsch, absolument pas envisageable, très peu onirique, très personnel et assurément original.

Si le but ultime, la démonstration du théorème Zéro, a assurément de quoi faire mal à la tête, sourire et donner à manger à ceux qui veulent y voir une science, ou une philosophie tout à la fois, il est intéressant de constater que le récit suit une trame humanisante. Quand le début de Zero Theorem s’évertue à dépeindre un héros déshumanisé, le contraire d’un homme intégré, étrangement perdu –  ce qui nous semble être le sujet même de la réflexion menée -, la suite du récit tend au contraire à réintégrer un à un les sentiments humains chez notre personnage, via des artifices basiques: le désir, le plaisir, le goût et principalement grâce à un corps étranger à la société, à la voisine Mélanie Thierry, rencontre virtuelle et réelle .

Le film offre de nombreux contrastes, inégalités qui plairont comme ils déplairont. L’abscons de la théorie mathématico-philosophique, la quête perdue de la démonstration d’un théorème absurde – on reconnaît là l’esprit Monthy Python– est ridiculisé par le graphisme du jeu vidéo qui doit en permettre la démonstration – un Tetris 3D qui semble sortie d’une publicité Atari.

Le ridicule, l’absurde peuplent cet univers en quête de sens. A vous d’y trouver le votre !

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