Un film de Todd Solondz
Le portrait d’un teckel et de tous ceux auxquels il apportera un bref instant de bonheur.
Un petit Todd Solondz suffit à faire un bon film, nous ne pensons là rien vous apprendre. Le Teckel n’est pas celui de ses films que nous vous conseillons de voir avant de mourir, sa filmographie comprend des œuvres plus intenses, plus intimes, plus décalées, plus profondes, plus caustiques ou dérangeantes. Pourtant, il présente deux très belles qualités manifestes, la première est son accessibilité, la seconde, son inspiration.
En conférence de presse lors du festival de Deauville où il fut récompensé à juste titre, le cynique réalisateur américain a bien voulu nous évoquer quelques unes des images qui l’ont inspiré pour cette histoire de teckel sorti de nulle part si ce n’est de son cerveau décidément très inventif.
Au hasard Balthazar de Bresson lui a ainsi donné l’idée de la trame narrative, quand Week end de Godard a été sa source d’inspiration pour un travelling le long d’un trottoir. Ce mouvement est tout un symbole du cinéma de Solondz, puisqu’il mêle le beau (la musique signée Debussy) et le scatologique. Avouons-le, l’une comme l’autre des références assumées nous semblent tout à la fois provocatrices et sincères. Comme bon nombre de cinéastes américains, le parcours universitaire de Solondz lui a fait découvrir dans sa prime jeunesse quelques uns des plus beaux films français, et cela reste naturellement une source d’inspiration dans laquelle il aime puiser, même s’il aime à les digérer dans son propre univers !
Bien entendu, nous retrouvons tout ce qui fait l’univers de Solondz, dans cette énième histoire de mal-aimés attendrissants et non sans défaut ! Que ce soit la part belle accordée aux laissés pour compte – il aimerait qu’on voit en lui un cinéaste humaniste, plaisante-t-il, quoi que nous ne sommes pas loin de penser qu’il ait raison dans le fond, peu importe sa tendance provocatrice, son goût pour les fins sans espoir ou les sujets « hot » -, mais aussi et surtout un regard à la fois tendre, comique mais aussi accusateur, la marque de fabrique est bien présente, et pour qui découvre son cinéma probablement un motif d’émerveillement.
Si le Teckel nous semble plus mineur que ses précédentes œuvres, c’est parce que la forme qu’il a choisi oblige à un récit un peu décousu. Les personnages – tous propriétaires de Teckel bien particuliers – sont abandonnés en cours de chemin, pour ouvrir une nouvelle page, sur une nouvelle histoire de teckel, là où d’habitude Todd Solondz excelle dans l’observation psychologique, dans l’approfondissement de ses sujets principaux. Mais peut être sommes nous par trop exigeant, le sujet principal est un Teckel, rappelons-le, ses joies, ses rêves, ses épreuves, ses digestions sont tour à tour passées au crible.
Todd Solondz nous semble également bien plus sage et apaisé, quoi que certaines scènes ont de quoi révulser, que ce qu’il a pu l’être pour Bienvenue dans l’âge ingrat par exemple.
Parmi les plaisirs que vous pourrez avoir à vous rendre en salle pour passer une heure trente en compagnie de quelques teckels, citons le casting qui convie trois acteurs générationnels de renom.
Julie Delpy ouvre ainsi le film, et comme de bien entendu, quelques mots fleuris lui échapperont, héritage de son éducation et plus particulièrement de son hilarant père. Julie Delpy aime d’ailleurs elle aussi insuffler des dialogues volontairement grossiers, de façon très naturelle, dans ses propres films.
Un autre propriétaire de Teckel, à qui Solondz confie un rôle qui nous semble assez proche de Solondz l’homme, n’est autre que Danny De Vito, dont la carrière a pris un léger coup d’arrêt vers la fin des années 2000. Danny De Vito campe un professeur de cinéma has-been, qui vit sur le succès désormais lointain de son premier scénario, qui lui a valu renommée et son poste de professeur. Ce personnage permet à Solondz de glisser quelques unes de ses propres réflexions sur le cinéma, sur la façon de le raconter, sur les techniques narratives que lui même enseigne.
Todd Solondz s’est également attaché les services d’une icône montante du cinéma américain indépendant, en la personne de Greta Garwig, qui a notamment marqué les esprits dans les films de son compagnon Noah Baumbach Frances Ha et Mistress America.
Pour finir de vous convaincre de vous déplacer en salle, nous opérons un retour sur la cérémonie de Deauville et le discours, très drôle, de Todd Solondz.