L’histoire d’un jeune homme qui se rend à Hollywood dans les années 1930 dans l’espoir de travailler dans l’industrie du cinéma. Il tombe amoureux et se retrouve plongé dans la vie effervescente de l’étonnante « Café Society » qui marque ces années folles.
Woody Allen n’est jamais aussi bon que lorsqu’il parle de ce qu’il connaît, c’est à dire des femmes qu’il a aimées, de New York, du jazz, de la religion juive, de la psychanalyse, du cinéma et de lui … A contrario, l’effet souriant doux amer qu’il produit, le traitement malicieux de la gravité, s’estompe voire disparaît quand il s’attaque à un sujet qu’il ne connaît que sous quelques aspects trompeurs. Ainsi ses portraits de Barcelone et de Paris pouvaient sans aucun doute parler à de nombreux touristes, mais les spectateurs que nous sommes ne peuvent se satisfaire d’une intrigue fabriquée – et donc désincarnée- dans un décor planté, balisé, quasi carton-pâte.
Cafe Society propose un récit qui dépeint l’envers du Hollywood des années 30-40, convie quelques grands noms de l’époque à venir ornementer une histoire familiale. Très vite, l’effet nous semble chic et malin. Woody Allen, dans une narration très épurée dont il a le secret, livre un récit qui se joue de différentes oppositions, qu’elles soient sociales, de style, celles entre New York et Hollywood, celles entre les deux sources de rêves et d’enrichissement de l’époque, la pègre et le cinéma. Bien entendu, pour que le tout ait suffisamment de sève, Woody Allen y rajoute une intrigue amoureuse des plus tumultueuse. Le même sujet pourrait faire l’objet d’un drame psychologique, pour peu que l’on s’arrête aux états d’âme. Mais dans ce cas, la richesse narrative contrarierait l’intention. Le rythme aussi serait à réinventer, et Woody Allen ne pourrait se permettre ses nombreuses blagues et observations sur la religion juive, toute plus souriantes les unes que les autres. Mais le projet est ici contraire, nulle place pour le drame, les effets dévastateurs des sentiments perdus, chacun des personnages va de l’avant, dans sa propre logique, et quand il pourrait sombrer rebondit aisément – n’est-ce pas là la magie du cinéma que de pouvoir enrober les choses d’un positivisme à tout épreuve ?
Le tout est savoureux, léger et clinquant comme les notes jazzy qui accompagnent tout le long ce Cafe Society très réussi dans son genre. Bien servi également par le quatuor formé par Steve Carell, Blake Lively, Kristen Stewart et Jesse Eisenberg (pour une partition qui nous semble être celle que Woody Allen se serait volontiers octroyé étant plus jeune), le festival de Cannes démarre avec de belles intentions – à confirmer !