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FEFFS – Refroidis, un justicier dans la neige

Le blanc immaculé de la toile est recouvert d’un rouge sang. La toile c’est la neige norvégienne, le sang celui des victimes de Nils (Stellan Skarsgård), un père décidé à venger la mort de son fils assassiné par la pègre. Refroidis est un thriller poétique, une fable burlesque, un sourire grimaçant, un rire jaune.

Présenté dans la section « Crossovers » du FEFFS, le septième long métrage de Hans Petter Moland violente et apaise, provoque chez le spectateur un rictus de plaisir et un sentiment d’étrangeté. Ces paradoxes, Refroidis les manie à merveille, condense différents registres sans oublier la forme et le développement de l’intrigue.

La forme justement parlons-en. Aidée par la beauté naturelle des paysages de la Norvège, la photographie de  Philip Øgaard  connote une virginité que viendra doublement déblayer Nils. Sa fonction de conducteur de chasse-neige propose en effet deux niveaux de lecture. Nils est celui qui révèle ce que la masse neigeuse cachait, mais il est aussi celui qui – à l’instar de Clint Eastwood (Dirty Harry, Don Siegel, 1971) ou Charles Bronson (Un justicier dans la ville, Michael Winner, 1974) – dynamitera les bas-fonds pour en révéler le caractère insolite et transgressif. Car le récit du film est pluriel voire choral. De Nils nous passons à Greven (Pål Sverre Valheim Hagen) un gangster malheureux en amour et adepte de nourriture bio, puis à Papa (Bruno Ganz) chef de la mafia serbe, diminué et sensible, sans oublier Geir (Anders Baasmo Christiansen) homme de main de Greven, secrètement amoureux de son coéquipier Aron (Jakob Oftebro). Ponctué de décès signalés par des intertitres prenant la forme d’épitaphes, le film dénoue les situations pour mieux les complexifier. On rit la larme à l’œil devant la réaction de Papi fasciné par les skieurs, ou face à celle de Aron et Geir dont les gestes d’affection contreviennent à l’esprit du film de gangsters.

On retrouve l’univers de Pusher (Nicolas Winding Refn, 1996), le style du Lars Von Trier seconde manière, les imbroglios criminels de Guy Ritchie. Nous l’avons dit, Refroidis condense, et ce d’une très belle manière. Impossible de rester de marbre devant les imprécations du petit garçon quémandant à son ravisseur de lui lire une histoire, n’importe laquelle, même une tirée d’un catalogue de chasse-neige. Refroidis s’élève pour mieux retomber, avec délice, brutalité et délicatesse. Question de redite une fois encore : les contradictions s’harmonisent, et la neige continue de tomber, toujours.

 

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