Un chat sous le bras, des portes closes, rien dans les poches, voici Paula, de retour à Paris après une longue absence. Au fil des rencontres, la jeune femme est bien décidée à prendre un nouveau départ. Avec panache.
Jeune femme est assurément le meilleur film, toutes catégories confondues, que nous ayons vu à Cannes. Nous l’avons tellement aimé que nous sommes retournés deux fois le voir durant le festival. Ce qui constitue une exception dans notre vie cinéphilique.
Bien que Léonor Seraille dit s’être inspirée de Sue perdue à Manhattan (Amos Kollek) on repense beaucoup en (re)découvrant Jeune femme aux films dits “trois pièces cuisine”, ces films où brillaient alors Valéria-Bruni Tedeschi : Les gens normaux n’ont rien d’exceptionnel (Laurence Ferreira Barbosa) Oublie-moi (Noemie Lvovsky), ou le court métrage Le poisson rouge de Cédric Klapisch.
La scène d’ouverture est assez épique : une jeune femme (donc), tout juste rentrée du Mexique, rousse et fantasque, yeux vairons, trouve porte close. Derrière cette porte, l’homme qu’elle aime. Elle s’y cogne violemment au point de se retrouver aux urgences, ce qui donne lieu à un monologue déjà culte, un monologue en réalité très écrit mais que le talent de Laetitia Dosch fait passer pour totalement naturel, voire improvisé.
Paula (c’est le nom du personnage), à l’opposé de la Sue d’Amos Kollek n’est pas une victime, ni une femme en perdition. Comme les personnages qu’a souvent incarnées Bruni-Tedeschi, elle est un peu décalée, fofolle. Du moins au début du film, où elle pète les plombs et se retrouve à la rue, sans appuis amicaux ou familiaux.
Contrairement aux films auxquels nous l’avons comparé, Jeune Femme est un film très drôle, punchy, formidablement rythmé et scénarisé, inattendu. C’est le récit d’une mue, d’une personne qui, face aux adversités de la vie, va se transformer de manière positive, déjouant la fatalité d’une situation difficile. Rien n’y est prévisible, tous les personnages (notamment le chat qu’elle emmène un peu partout) existent et sont originaux, construits, loin des codes cinéphiles, aussi réels et surprenants que les gens de “la vraie vie”.
En raison des qualités que nous avons mentionnées, Jeune femme est un feel good movie, tout en étant profond, surprenant, novateur, avec une nouvelle façon de voir et de filmer les choses mais aussi de les interpréter.
Laetitia Dosch apporte sa fougue au film.. A l’instar de Julia Roberts à l’époque de Pretty Woman, on peut parler d’une véritable révélation : un naturel, un fraîcheur, une personnalité différente, unique. Ces qualités ont, selon la réalisatrice, apporté des traits au personnage de Paula, de même que Paula a influencé Laetitia Dosch.
Car Paula est quelqu’un qu’on rêve tous d’être : elle dit tout ce qu’elle pense en toutes circonstances, elle fait ce qu’elle veut sans se soucier du regard des autres, elle déjoue l’adversité, telle une plante qui renaîtrait sans cesse malgré les plus corrosifs des insecticides.
Nous sommes fous amoureux de ce film qui est le meilleur qu’on ait vu à Cannes : meilleur que les films de la compétition officielle, meilleurs que les pépites, pourtant géniales, que nous avons découvertes à la Quinzaine des réalisateurs . Qu’il obtienne la caméra d’or n’était que justice. Idem pour le Prix du Film Français Indépendant Il aurait même mérité de figurer au plus haut au palmarès d’Un Certain Regard, car Jeune femme est le meilleur film de l’année et durera dans le temps.
Découvrez notre interview de Léonor Serraille et Laetitia Dosch ainsi que notre vidéo de l’accueil fait à Cannes au film :