Deux, Le premier film de Philippo Meneghetti, représente la France aux Oscars 2021. Il a été également honoré à la cérémonie des Lumières et est nommé à quatre reprises aux César 2021(dans les catégories du meilleur premier film, meilleur scénario original – coécrit par le réalisateur -et de la meilleure actrice pour ces deux comédiennes: Martine Chevallier, de l’Académie Française, et l’Allemande Barbara Sukowa).
Deux est ainsi l’un des films français les plus récompensés de 2020. A cela s’ajoute la réaction majoritairement positive des médias, notamment les magazines de cinéma en ligne.
Nous regardions donc le film avec un niveau d’attente élevé, et nous nous demandons pourquoi un tel succès? Est-ce que le film a attiré l’attention des organisateurs des prix uniquement pour son sujet hier polémique, aujourd’hui tendance, ou bien est-il doté d’une forme si intéressante et remarquable?
Deux raconte l’histoire d’une relation lesbienne tourmentée et difficile à vivre, en utilisant les codes du cinéma d’horreur. Dès la première scène – la disparition d’une petite fille dans une ambiance angoissante – cette démarche esthétique qui assombrit l’image et qui fait référence au cinéma de genre semble présente.
Tout au long du film, une forme minimaliste assumée (nombre de personnages et de lieux limité, mise-en-scène simple qui met l’accent sur les détails) se développe en parallèle d’un rapprochement étrange vers le cinéma de genre (musique, personnages secondaires horrifiants). Ce choix crée en conséquence le plus grand défaut du film: au lieu de mettre en avant la personnalité différente des deux femmes et d’enrichir leur relation, le réalisateur essaye de construire un univers menaçant, avec des gestes exagérés, voir irréaliste, qui transforme le film en une expérience cauchemardesque. Une esthétique qui ne correspond pas parfaitement au thème.
Deux parle d’un sujet – sans doute – politiquement important et intéressant: une liaison interdite et affectée par l’incompréhension de l’entourage. Il met un focus également sur la vieillesse, plus précisément la difficulté de se projeter et de changer de vie après avoir passé un certain âge. Dommage que le traitement ne rajoute pas de profondeur, là où d’autres films sur un thème identique le faisait (Carol de Todd Haynes nous vient à l’esprit tout de suite). Dommage également que des prix soient décernés à un film sur des critères tels que le sujet « politique » plus que sur la valeur artistique intrinsèque du film …