D’un film autobiographique sur sa jeunesse dans les années 90, Honoré fait sa plus belle oeuvre.
Le film divise, voire scinde. « Chef-d’oeuvre », « film moyen », « film nul », voici ce que vous entendrez sur Plaire, Aimer et courir vite – que nous nous sentions seule à la conférence de presse!
Nous le trouvons sans défaut. L’oeuvre la plus réussie de toute la carrière d’Honoré, qui déploie ici ses dons multiples (d’écrivain, de dramaturge, de cinéaste) pour le meilleur.
Il est question, de manière implicite, de la vie du jeune Christophe Honoré, à la belle (?) époque du début des années 90 ; la belle jeunesse, certes, mais marquée du sceau de l’infâme SIDA, omniprésent car tout puissant à l’époque (à l’époque du SIDA on mourrait, à l’époque il provoquait une hécatombe).
L’autre figure principale du film est un écrivain incarné par Pïerre Deladonchamps (le rôle était au départ destiné à Louis Garrel, mais il s’est désisté par crainte de la nudité et du côté explicite de certaines scènes d’amour -entre hommes); un écrivain qui pourrait être aussi Honoré, et ressemble fortement à un mélange d’Hervé Guibert et de Marie-Koltès.
L’image est bleutée, superbe, tournée en argentique. Ce qui, comme le fait justement remarquer Honoré, impacte le jeu d’acteur, il y a le jeu argentique et le jeu numérique. Nous avons un faible pour l’historique jeu argentique, moins fake et dispersé. La reconstitution de l’année 1993 est parfaite car discrète, impalpable. Les amours défuntes (et pas qu’au sens figuré) émeuvent au possible. Lacoste, qui restera toujours un peu Hervé dans Les beaux gosses (autre rare film tourné à Rennes) est magnifique en gueule d’amour, parfaitement juste dans son jeu. Les destinées sentimentales se croisent de manière parfaite et juste. Les fantômes de Koltès et d’Hervé Guibert déploient leurs ombres.
Le film est injustement comparé à 120 battements par minute car il parle d’amours homosexuelles, de SIDA et d’une époque révolue. Pourtant, dans leur structure et ce que veulent nous communiquer leurs auteurs, il n’y a aucun point commun, et nous préférons Plaire, Aimer et courir vite qui nous touche au cœur, auquel on s’identifie quand bien même objectivement nous n’avons rien à voir avec ses histoires -ou justement parce que nous nous y reconnaissons sans avoir de points communs objectifs avec les personnages et leurs histoires.
Tout ce qu’on pouvait reprocher à Honoré, dont nous ne sommes pas les fans systématique, n’est plus. Reste un film génial sur une époque qui nous fait écho, celle du bleuté, de la beauté, de la tristesse de celle-ci lorsqu’elle est vouée tragiquement à sa fin imminente.
Le diaporama de la conférence de presse: