Le portrait rapide de Jean-Jacques Beineix
Ses origines
Il est le fils de Robert Beineix, directeur d’une compagnie d’assurances, et de Madeleine Maréchal, dont on ne sait que peu de choses. Il grandit à Paris.
Sa biographie accélérée
Jean-Jacques Beineix nait le 8 Octobre 1946 à Paris en et meurt le 14 Janvier 2022 à Paris des suites d’une Leucémie. Il aura été tour à tour publicitaire, assistant-réalisateur, réalisateur, écrivain, dialoguiste, scénariste, producteur, et metteur en scène de théâtre.
Les passions de Jean-Jacques Beineix
Très cultivé et passionné, il aura réalisé à partir des années 90 des documentaires qui en témoignent: Otaku : fils de l’empire du virtuel (1993) s’intéresse aux collectionneurs passionnés au Japon, Place Clichy sans complexe (1994) lui permet de filmer le chantier de réfection du cinéma Pathé Wépl, Les Enfants de Roumanie (1992) s’intéresse à la Roumanie d’après révolution, Assigné à résidence (1997) suit Jean-Dominique Bauby alors qu’il achève la rédaction de son livre Le Scaphandre et le Papillon, Les Gaulois au-delà du mythe (2012) questionne ce qu’était les Gaulois, Loft Paradoxe (2002) TODO. Alors que sa carrière de cinéaste bat de l’aile, la faute à une forme de « blacklistage », consécutif à ses rapports entretenus avec certains professionnels de la profession comme dirait Godard, ou même avec la critique qui tend à voir en lui un formaliste vain (et l’associe injustement à ce niveau à Besson), il s’intéresse à d’autres arts. Il fait ainsi paraître L’Affaire du siècle, une série de bande dessinée fantastique qu’il écrit en adaptant le roman de Marc Behm La Vierge de glace. Il participe également au coloriage (les dessins étant réalisés par Bruno de Dieuleveult avant que ce dernier ne décède) .
Au théâtre, il met en scène Kiki de Montparnasse en 2015. Côté littérature, on lui doit une autobiographie Les chantiers de la gloire, mais aussi en 2020, un roman Toboggan.
Comment Jean-Jacques Beineix en est venu à faire du cinéma ?
Élève au lycée Carnot, puis au lycée Condorcet de Paris, il s’inscrit en médecine après son baccalauréat, passe et échoue le concours de l’IDHEC. Il débute dans la publicité en 1969, pour subvenir à ses besoins, en même temps qu’il travaille comme assistant-réalisateur, pour Jean Becker sur la série télévisée Les Saintes Chéries (1964-1967), puis Claude Berri Le Cinéma de papa (1970), René Clément La Course du lièvre à travers les champs (1971) et Claude Zidi sur L’Animal (1977). Mais c’est par la voie du court métrage, de façon tardive (un peu comme Pialat) qu’il fera, en 1977, ses vrais débuts de réalisateur, avec le film Le Chien de Monsieur Michel qui obtient le premier prix au festival Off-Courts de Trouville.
Les films importants de Jean-Jacques Beineix
avec Wilhelmenia Wiggins Fernandez, Frédéric Andrei, Jacques Fabbri, Richard Bohringer, Thuy An Luu, Roland Bertin, Gérard Darmon, Dominique Pinon, Jean-Jacques Moreau, Brigitte Lahaie, Laure Duthilleul, Isabelle Mergault
Un jeune postier amoureux du bel canto réalise un enregistrement pirate d’un concert donné par une diva. Sa passion et un hasard malencontreux vont provoquer une chasse à l’homme dont il est la proie.
Ce film est important dans la carrière de Jean-Jacques Beineix à plus d’un titre. Il s’agit de son premier long métrage, et il rencontre un succès public, après une première phase d’exploitation plus confidentielle (300 000 spectateurs au bon d’un an) très inattendu et très important avec plus de 2 millions 700 000 spectateurs, après que le film obtient 4 Césars. Le film haut en son et en couleur mêle un rythme endiablé, une forme de sentimentalisme parfaitement assumé, une mise en scène qui n’a pas peur d’emprunter à ce qui se fait du côté du clip dans les années 80 (tout comme le fait au même moment un certain Leos Carax), avec un onirisme très foutraque qui peut déranger comme émerveiller.
avec Gérard Depardieu, Nastassja Kinski, Victoria Abril
Gérard, un docker, est obsédé par sa recherche de l’homme qui viola sa sœur, provoquant le suicide de cette dernière. Sa quête lui fait rencontrer la riche Loretta, dont il tombe amoureux au point d’oublier sa maîtresse Bella. Jalouse, cette dernière tente de le faire tuer. Gérard en réchappe et retourne à son obsession, oubliant les deux femmes.
Ce film très étonnant voire dérangeant fit scandale au festival de Cannes. Malgré un casting 5 étoiles, son esthétique très travaillée et léchée ne fut pas du goût de tous les critiques, le scénario et les dialogues encore moins. Aujourd’hui encore La Lune dans Le caniveau reste un film difficile à appréhender.
avec Béatrice Dalle, Jean-Hugues Anglade
Écrivain maudit résigné, Zorg, la trentaine, consume son temps entre petits boulots et tequila rapido sur les plages de l’Aude, lorsque Betty, jeune et sauvage créature au bord de l’abîme, débarque dans sa vie. À 20 ans, l’absolue Betty ne ressemble à nulle autre. Après lecture des manuscrits de Zorg, elle décrète que son homme est le plus grand écrivain de sa génération. Et ceux qui en doutent n’ont qu’à bien se tenir. Bientôt, les crises de Betty se succèdent, tandis que Zorg tente de de préserver leur amour happé par la folie…
La version longue du film n’est ni plus ni moins qu’un chef d’œuvre d’une très rare intensité et poésie. Beineix y découvre deux talents fous, Béatrice Dalle et Jean-Hugues Anglade.
avec Yves Montand, Olivier Martinez
Deux taggeurs en rupture de ban font la connaissance, lors du vol d’une voiture, d’un vieil homme qui parcourt la France avec un sac à dos et une carte ou tous les lacs sont cerclés d’une marque rouge. Dans son sac à dos, un vieux Luger dans le chargeur duquel deux balles attendent. Le vieil homme entraîne les deux jeunes dans sa quête et ils s’aperçoivent bientot qu’ils cherchent la même chose.
Un film maudit, qui fut le dernier d’Yves Montand. Très attendu, le film fut massacré par la critique, qui reprocha tout et n’importe quoi à Beineix, allant jusqu’à reprocher au réalisateur de ne pas l’avoir ménager pendant le tournage.
Le style / L’esthétique de Jean-Jacques Beineix
Jean-Jacques Beineix fut avec Besson et Carax classé, par des théoriciens du cinéma américain, parmi les cinéastes du Look. Derrière ce terme, une vague critique d’emprunté au style publicitaire (Beineix ayant fait un peu de publicités) sans n’avoir grand chose à dire, en somme d’être des formalistes vains. Pour autant, Leos Carax a continué de séduire (et séduit toujours) les critiques, qui de film en film, notent la poésie et l’inventivité du réalisateur. Mais Beneix est l’un des seuls réalisateurs à qui l’on ait pu reprocher d’avoir une belle image, une belle ambiance sonore, et d’oser proposer des mondes imaginaires et fantasmés (n’est-ce pas là toute une fonction du cinéma en soi ?) … Beineix a pris dans sa carrière plus encore de risque que Carax et son style, très coloré, très musical, ultra dynamique sans jamais être boursoufflé, à l’image de Diva, s’est toujours associé avec une forme poétique pouvant varier de film en film. Parfois l’onirisme, parfois le mariage des arts, parfois les abîmes. Beineix s’est toujours intéressé aux grands sentiments, aux sentiments passions, à la frontière de la passion, et n’aura eu de cesse de déranger et de bousculer les lignes. L’homme aura aussi déranger dans ses prises de position, et sa carrière de cinéaste en sera obstrué. Décrié au plus haut point dans les années 2000, il est fort à parier que son talent de cinéaste soit de nouveau mis en avant maintenant qu’il n’est plus de ce monde.
La carrière de Jean-Jacques Beineix
Sa carrière connu un démarrage tonitruant. Son premier court métrage, Le Chien de Monsieur Michel,reçut en 1977 le premier prix au festival Off-Courts de Trouville, et fut nommé au César du meilleur court métrage de fiction. Diva, son premier long métrage récolta 4 Césars, celui de la meilleure première oeuvre, de la meilleure musique (Vladimir Cosma), de la meilleure photographie (pour Philippe Rousselot), et du meilleur son (résumant ainsi le style Beineix, visuel et sonore !). Le film obtint également le prix de la critique au Festival International du Film de Toronto. Beineix fut nommé pour obtenir le prix du meilleur réalisateur de la NSFC (National Society of Film Critics). En 1984, alors très attendu, La Lune dans le caniveau, est sélectionné à Cannes et fait scandale, beaucoup de journalistes (et spectateurs) sortent de la salle en étant révulsés. Le film vaut pourtant des nominations aux Césars pour Victoria Abril, Philippe Rousselot, mais aussi au BAFTA Award pour être reconnu comme meilleur film étranger. Jean-Jacques Beineix goûte ensuite au triomphe en salle avec 37°2 le Matin est ses quasi 4 millions d’entrée. Le film, interdit aux moins de 16 ans, attire pour son côté sulfureux, mais aussi trouve en général un excellent écho dans la presse critique, hormis quelques personnes qui lui en veulent toujours d’avoir proposé La Lune dans le caniveau. Le film sera nommé 9 fois aux Césars (pour une seule récompenses, celle de la meilleure affiche …), et fut aussi nommé aux BAFTA, aux Golden Globes, aux Oscars, sans succès. Il obtint tout de même le Grand prix des Amériques au festival des films du monde de Montréal, et le prix du meilleur film en lange étrangère décerné par la société des critiques de Boston. IP 5 eut moins de succès critique et public. Il fut ceci dit récompensé de deux prix Golden Space Needle pour le meilleur réalisateur et le meilleur film au Festival International du Film de Seattle, mais aussi d’une étoile d’or d’honner aux étoiles d’or du cinéma français.
Nos films coup de cœur de Jean-Jacques Beineix
Outre le très coloré Diva, et l’incontestable chef d’oeuvre de Beineix (la version longue de 37°2 le matin), nous vous conseillons fortement de redécouvrir Roselyne et les lions, très rythmé et passionné.
La filmographie de Jean-Jacques Beineix
Film | Année de sortie | Nombre d’entrées en France |
1981 | 2 281 569 | |
1983 | 625 000 | |
1986 | 3 632 326 | |
1989 | 123 568 | |
1992 | 855 136 | |
2001 | 261 659 |
Quelques anecdotes sur Jean-Jacques Beineix
Jean-Jacques Beineix était également un mélomane. Il prend des cours de piano depuis la naissance de sa fille et en joue au quotidien, se passionnant pour des compositeurs classiques. Avec Cargo Films, il édite ainsi ses musiques qu’il signe en tant qu’auteur ou compositeur.
Au musée des années 30, à Boulogne Billancourt, il exposa les décors de ses films, dans une exposition nommée studio Beineix en 2013.
Entre 1992 et 2001, Beineix ne tourna plus de long métrage. Son envie avait disparu avec la férocité des critiques, les financements se faisant très difficiles à trouver pour lui après la campagne de dénigrement dont il fut victime après la sortie d‘IP 5 Il en profita pour réaliser des documentaires. Quand il revint au long métrage avec Mortel Transfert, là où il aurait pu espérer un effet d’attente, il fut massacré par les critiques, – Mortel Transfert étant de très loin il est vrai, son moins bon film. Il tenta de monter d’autres projets, mais jamais plus ne réussit à réaliser un nouveau film. Dernièrement encore il avait des projets, que ce soit Au revoir là-haut qu’il comptait adapter et qui donna le film guimauve multi-récompensé de Dupontel, ou même en 2017 il tenta de réaliser une adaptation d’un roman d’Hubert Selby Jr dont il avait acquis les droits, Le Démon. L’homme, toujours provocant, s’était aussi fait remarquer en 2020 aux Césars commentant la sortie d’Adèle Haenel, et lui reprochant de jeter l’opprobe sur la gente masculine toute entière en lui rétorquant, dans une interview pour RTL, que tous les hommes ne sont pas des violeurs. Militant, ses positions à l’ARP dont il était l’un des membres fondateurs, n’étaient également pas du goût de tout le monde, même s’il défendait corps et âmes, et parfois sur le ton de la colère, l’exception culturelle française. Il intenta un procès à Studio Canal qui avait modifié la bande son de Diva après en avoir récupéré les droits pour le diffuser aux Etats-Unis.
On doit aussi à Beineix quelques publicités célèbres comme la campagne gouvernementale le Sida il ne passera pas par moi en 1987:
ou encore une pub pour Fuji, avec un style hyper coloré qui lui correspond: