Un film de Walter Salles
Avec: Fernanda Torres, Fernanda Montenegro, Selton Mello, Valentina Herszage, Maeve Jinkings, Dan Stulbach, Humberto Carrão, Carla Ribas, Maitê Padilha, Guilherme Silveira
Quand son mari est enlevé par la dictature militaire dans le Rio des années 70, Eunice est une mère de famille éloignée de la politique. « Je suis encore là » raconte sa métamorphose en une femme déterminée à comprendre et qui va mener un combat acharné contre le régime militaire.
Notre avis: **
Walter Salles presque porté disparu revient par la grande porte de la Sala grande de Venise avec un film à sujet, qui revient très souvent dans le cinéma sud-américain, le retour sur les heures sombres, les exactions des dictatures militaires, les tortures et les disparus. Dés les premiers instants, le réalisateur de Central Do Brazil livre ses intentions, placer son récit essentiellement en jouant de la corde sensible. Il introduit une famille brésilienne riche, qui vit à l’occidental, dans la joie, la bonne humeur. Les filles sortent, dansent aux sons européens et rêvent d’Europe, les jeunes garçons peaufinent leur technique footballistique sur la plage, d’autres s’adonnent au beach volley. La fête la plage, la famille unie, les amis et l’ambiance collective, la croyance en un avenir radieux porté par une jeunesse insouciante quand pourtant le régime militaire fait porter une menace sur cet équilibre, que l’on parle des hélicoptères survolant Copacabana, ou plus encore des arrestations et fouilles autoritaires perpétrées par la police sur la route de retour de plages, pour retrouver des ennemis identifiés du régime, des terroristes présumés. Rapidement aussi, nous comprenons que Walter Salles veut s’attarder sur son récit, pour se donner une chance de nous saisir, de nous émouvoir. Il convient de dire d’emblée que cette histoire vraie, semblable à tant d’autres au Brésil (20000 disparus) présente deux attributs qui réhaussent son potentiel cinématographique/dramatique. Tout d’abord le fait que cette histoire ait pu être ébruitée et documentée, notamment de très émouvantes photos d’époque que le générique final nous restituera gracieusement. D’autre part, le fait que le personnage principal de cette histoire s’invite de lui-même sans qu’il n’y ait besoin d’y rajouter des éléments artificiels. Le combat mené par l’épouse de notre disparu le fut dans la plus grande dignité, elle ira jusqu’à reprendre des histoires de droit et devenir une éminente représentante d’une cause tout aussi importante et prégnante au brésil, la défense des peuples indigènes. Salles ne s’y attardera que très peu, préférant s’attarder sur ces quelques motifs qu’il a décidé de développer, la famille, l’interrogatoire, l’angoisse de ne pas savoir la préservation de l’équilibre familiale, mais aussi l’obligation de vivre dans le secret, pour préserver les autres, au sein de la cellule familiale – les plus jeunes pour ne pas les terrifier mais aussi dans le groupe d’amis au nom de la cause politique, du combat plus large mené et dans le contexte d’une menace permanente, d’une épée de Damoclès au dessus de chaque personne pouvant de près ou de loin être rattachée à la lutte anti-régime. Salles parvient certes par instant et dans son final à nous émouvoir, mais il eut pu le faire bien plus intensément s’il eut opté pour une durée plus courte, si sa mise en scène était aller chercher d’autres possibles et s’il fut pionnier ou lanceur d’alarme. Car ici, il ne fait qu’ajouter un film de plus sur la liste, sans formellement ou intellectuellement apporter une composante qui l’en démarquerait. Cette impression de déjà-vu nous aura accompagné les 2h30 durant.