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Hot milk de Rebecca Lenkiewicz

Un film de Rebecca Lenkiewicz

Avec: Emma Mackey, Fiona Shaw, Vicky Krieps, Vincent Perez, Patsy Ferran, Yann Gael, Πάρις Θωμόπουλος, Κορίνα Γουγούλη

Rose et sa fille Sofia se rendent dans la ville balnéaire espagnole d’Almería pour consulter le Dr Gomez, un médecin chamanique qui pourrait bien détenir le remède à la mystérieuse maladie de Rose, qui l’a clouée dans un fauteuil roulant. Mais dans l’atmosphère sulfureuse de cette ville baignée de soleil, Sofia, qui a été piégée toute sa vie par la maladie de sa mère, commence enfin à se débarrasser de ses inhibitions, attirée par les charmes persuasifs de l’énigmatique voyageuse Ingrid.

Un premier film, sensuel, quoi que traitant d’un sujet très questionné politiquement de nos jours, le droit à mourir, à se laisser mourir. Le film, adaptation du roman à succès éponyme de Déborah Levy s’intéresse principalement à un huis-clos entre une jeune femme, Sofia, qui sera vite rattrapée par ses amours, et sa mère. Toutes deux vivent de manière très isolée, en étrangères, sur la côte andalouse, et nourrissent avec ce territoire des aspirations, voire des pulsions contraires. La mère s’y voit finir ses jours, dans le désert, jadis apprécié, la fille y voit une terre d’accueil potentielle à un nouveau départ. De manière troublante, le décor joue ici un rôle essentiel, à la manière des dunes dans Sous le Sable de François Ozon, chacun des protagonistes étant étrangers, justifiant probablement le casting très international et multilingue (Emma Mackay franco britannique interprète Sofia, Fiona Shaw ireandaise joue sa mère Rose, Vicky Krieps son amoureuse et Vincent Perez, un médecin semblant franco-espagnol). Le contraste saisissant entre les deux femmes vaut sujet, mais aussi décor. Leur relation, toxique au plus haut point, pour l’une, comme pour l’autre, les emprisonnent. La mère – Fiona Shaw, rappelant Charlotte Rampling dans Sous le sable d’Ozon – le rapprochement entre les 2 films vaut aussi pour la trame narrative, qui entretient un mystère psychologique qui ne sera résolu, de façon ouverte et laissant la place à interprétation, que dans les derniers instants du film – tient précisément à garder sa fille auprès d’elle, quoi qu’elle lui fasse vivre, du fait de son handicap, et plus encore de son caractère acariâtre, grincheux, autoritaire et castrateur, des moments difficiles. Un médecin, tentant de lui faire retrouver l’usage de ses jambes, notamment par des voies psychothérapeutiques, décèle que la relation entre les deux cache un non dit, un élément traumatique. A ses côtés, pour la jeune femme, interprétée par Emma Mackey, connaît d’autres troubles, qui l’enjoignent à s’émanciper, à lâcher prise, à se libérer de l’emprise de ce qu’elle considère comme une situation, mais qu’elle vient peu à peu à mettre en doute, rejetant alors la faute sur sa mère. Elle vivra un amour avec une chevalière blanche, Vicky Krieps presque tout droit sorti d’un film d’Alice Rochwacher, libre mais traumatisée, exact contraire de l’actrice dans sa vraie vie, dira-t-elle en conférence de presse, mais s’empressant de se contredire en avouant une duplicité mentale la rapprochant nécessairement du personnage, mais encore finira par se résoudre à rendre visite à son père, pour mieux comprendre sa mère et ses secrets. Se jouant d’une matière psychologique troublante, Hot Milk s’attache également, en son cœur, à mettre l’accent sur l’extérieur, sur la sensualité, le désir qui naît en Sofia, et celui qu’elle fait naître chez les autres. Ce même chaud froid que l’on expérimentait quelques années en arrière dans Sous le sable.

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