
Avec: Benjamin Voisin, Rebecca Marder, Pierre Lottin, Swann Arlaud, Denis Lavant, Jean-Charles Clichet, Jean-Benoît Ugeux
Alger, 1938. Meursault, un jeune homme d’une trentaine d’années, modeste employé, enterre sa mère sans manifester la moindre émotion. Le lendemain, il entame une liaison avec Marie, une collègue de bureau. Puis il reprend sa vie de tous les jours. Mais son voisin, Raymond Sintès vient perturber son quotidien en l’entraînant dans des histoires louches jusqu’à un drame sur une plage, sous un soleil de plomb…
Avec L’Étranger François Ozon propose une adaptation parfaite du roman de Camus: un film qui révèle le potentiel cinématographique de ce chef-d’œuvre littéraire et permet de constater à quel point le style d’écriture simple et factuel de Camus se prête idéalement à être incarné à l’écran. Ici l’impression de simplicité vient du fait que tout dans le travail d’Ozon semble juste et naturel, tout est bien pensé, employé avec le bon dosage: l’utilisation parcimonieuse de la voix-off, les retours dans le temps, l’image en noir et blanc (le sublime travail de Manu Dacosse avec la lumière du jour), la musique, les décors réalistes, et le jeu à la fois très puissant et maîtrisé de Benjamin Voisin, qui affirme son talent en réussissant un rôle aussi complexe. Voisin a compris le rôle de telle façon qu’il vit dans la peau de Meursault, comme si le personnage est écrit sur mesure pour lui.
Plus de 80 ans après la publication du roman, la pensée de Camus nous trouble toujours, peut-être plus encore aujourd’hui. En regardant le film, nous trouvons que la position du roman par rapport au contexte colonial dans lequel il s’inscrit, est particulièrement troublante. Par ailleurs, Camus attaque frontalement, notamment à travers la séquence du procès, l’esprit moralisateur de la société qui entoure son personnage. Pour toutes ces raisons, nous apprécions le geste – courageux – d’avoir réalisé cette adaptation, nécessaire.

