Dans une édition de la Berlinale dans l’ensemble très décevante émergeait un petit trésor iranien, The great yawn of history, à la lisière entre plusieurs influences très perceptibles. Celle de Tarkovski en premier, lorsque la réflexion mystique passe par les paysage et les saisons, celle de Purumbiu (Le trésor) , celle de Kiarostami par sa quête initiatique (Le goût de la Cerise), mais aussi celle d’Alice Rochwacher complètera Aliyar Rasti, citant La Chimère comme l’une de ses influences premières (ce qui peut sembler étonnant au vu du peu de temps écoulé entre les deux films). Nous pourrions rajouter aussi que le film pouvait nous rappeler aussi une expérience de cinéma comme celle qui animait Jean-François Stévenin, lorsqu’il entreprit Passe-Montagne. Le temps long, qui s’éprouve et se ressent, celui de l’effort, laisse entièrement la place à met en lumière le dialogue philosophique au plus proche de l’existence qu’entretiennent deux personnes en proie aux plus profondes questions existentielles, tout à la fois en contraste et en similitude. Ces deux êtres détachés, hors tout, partent dans une quête mystérieuse dont tous deux attendent une forme de révélation, de renaissance comme d’expiation. Ce récit très fortement imprégné de mythologies orientales (on pense évidemment aux Milles et une nuit et à Ali Baba et les quarantes voleurs) offre en tout cas un merveilleux cadre pour prolonger une autre réflexion, qu’est-ce que le cinéma, à l’heure où les techniques convergent, et où le geste cinématographique plus que jamais tend à se perdre sous la pression de l’industrie, plus que jamais avide de répéter une recette miracle. Le miracle, précisément, ne peut venir que de la singularité, du geste artistique sincère et personnel (Aliyar Rasti nous interpelle lorsqu’il évoque une retraite en plein désert, dans un caravansérail, qu’il a entrepris à un moment où lui même s’interrogeait sur sa place sur terre, sur son avenir et ses rêves). Le film est reparti de la Berlinale avec un prix du jury ex-aecquo en sélection Encounters, et pour nous, fut tout simplement l’un des seuls films réellement valables de cette édition de la Berlinale qui manquait singulièrement de cinéma.