L’été est traditionnellement la saison pauvre des bonnes sortie cinéma, voici ici un guide des quelques pépites qui surnagent bien au dessus du lot, pour ne pas vous faire regretter d’avoir payé votre place.
Le monde est à toi
Le monde est à toi est un film jubilatoire. Le style visuel et la virtuosité de Romain Gavras, celle de ses clips, celle de son précédent film, sont au rendez-vous. Cet anti Parrain (il s’agit de ne pas magnifier les truands, bien au contraire) nous fait décoller dès ses premières images, pour ne nous laisser ré-atterir qu’à la toute fin. Multi référentiel (les films de bandits, Booba, le mythe des Illuminatis), aucune seconde n’est perdue pour le spectateur. Comme toujours la photographie et la mise en scène sont impeccables -c’est là le grand talent de Gavras fils. S’il ne fallait mettre en avant qu’une seule qualité, sans ambiguité, ce serait les rôles et leurs interprètes. Jamais on n’avait vu Adjani jouer un tel personnage, aux antipodes de tout ce qu’elle a pu interpréter. Sans aucun doute son meilleur rôle depuis La journée de la jupe. Dans Le monde est à toi elle vient nous rappeler qu’elle est la « taulière » du cinéma. Vincent Cassel joue un contre-emploi en petit voyou fatigué et lent d’esprit. On a le plaisir de retrouver Oulaya Amamra ( découverte dans Divines) en jeune femme fatale et vénale. Karim Leklou, tout comme le reste du casting, fait ses preuves en petit truand vieux garçon voulant avoir une vie honnête et normale. A noter que le moindre petit rôle est tout aussi travaillé que les rôles principaux. Le monde est à toi possède une caractéristique particulière : complètement prenant lorsqu’on le visionne, il ne laisse aucune empreinte au spectateur après, comme une sorte de rêve bizarre et marrant.
BlaKkKlansman
Under the silver lake
Dogman
Dogman était – pour partie – notre Palme. L’histoire de Marcello, gentil petit homme, toiletteur pour chien, un petit peu dealer à ses heures, qui se fera entraîner dans l’enfer sans le vouloir par Simoncino, un caïd brutal et sans cœur, littéralement une « bête humaine ».
Le scénario, tiré d’un fait divers, est simple, et tient sur un ticket de métro. C’est ce qu’en fait Matteo Garrone qui nous envoûte. Images superbes et interprètes amateurs qui nous rappellent les grandes heures néoréalisme italien.
L’acteur principal, Marcello Fonte, véritable « gueule », personnage attachant qui imprègne la pellicule, est un acteur non professionnel qui a obtenu un très mérité prix d’interprétation à Cannes.
Fleuve noir
Eric Zonka, l’inoubliable et rare réalisateur de La vie rêvée des anges, a choisi d’adapter un polar israélien, Une disparition inquiétante, en y ajoutant sa touche personnelle. Ici le flic n’est plus trentenaire sain et sans histoire, mais un homme cassé, alcoolique, sale, désabusé, violent et au bord de la bavure. Le scénario et son issue sont encore plus sombres que le roman. Notons au passage une référence cinéphilique assez drôle, le personnage principal (Vincent Cassel) s’appelant François Visconti. Le casting est brillant et plein de contre-emplois réussis : Romain Duris en suspect coincé et inquiétant, Elodie Bouchez en gentille épouse de ce dernier, Sandrine Kiberlain en mère mutique et dissimulatrice d’un adolescent disparu, Hafsia Herzi a fliquette pleine de droiture, Charles Berling en rival clean de François Visconti . On note aussi la présence du rappeur Sadek, déjà vu dans Tour de France.
Glauque, poisseux et malsain, Fleuve Noir est digne des Editions du même nom et nous fait quelque peu penser au chef-oeuvre d’Alain Corneau, Série noire.
Le poirier sauvage
Une pluie sans fin
Une pluie sans fin est l’histoire d’une enquête fait dans les années 90 par Yu Guiwei, chef de la sécurité d’une grande usine sur une série de meurtres commis sur des jeunes femme. Ce film chinois peut faire penser au chef-d’oeuvre coréen Memories of murder. Pas aussi parfait que ce dernier, il reste une oeuvre de bonne facture, qui cache derrière une trame policière le tournant majeur l’histoire de la Chine à la fin des années 90.