La 47ème édition du Festival La Rochelle cinéma s’est ouverte hier sur la projection de It must be heaven d’Elia Suleiman. Une décennie sépare la réalisation de ce film et The time that remains (2009), désormais avant-dernière réalisation en date du réalisateur palestinien qui n’aura signé que cinq longs-métrages de fiction en un quart de siècle. Son dernier opus, dont il est question ici, lui a permis d’obtenir le Prix Fipresci et une Mention spéciale lors du festival de Cannes récemment clos.
ES fuit la Palestine à la recherche d’une nouvelle terre d’accueil, avant de réaliser que son pays d’origine le suit toujours comme une ombre. La promesse d’une vie nouvelle se transforme vite en comédie de l’absurde. Aussi loin qu’il voyage, de Paris à New York, quelque chose lui rappelle sa patrie.
Un conte burlesque explorant l’identité, la nationalité et l’appartenance, dans lequel Elia Suleiman pose une question fondamentale : où peut-on se sentir « chez soi » ?
It must be heaven et The time that remains ont pour point commun de voir leur réalisateur se mettre en scène devant la caméra. En l’occurrence pour It must be heaven, Suleiman se met volontiers et littéralement face à l’objectif de l’appareil pour interpréter un personnage anonyme qui pourrait être son double alternativement observateur des actions filmées ou simple figurant n’influant aucunement sur lesdites actions.
Le réalisateur-acteur fait là un choix étrange possiblement influencé par le cinéma de Buster Keaton et Jacques Tati. La non implication de son personnage omniprésent sur le cours des évènements créé une distance entre son personnage et les actions et, par effet de bord, entre le spectateur et le film. Cet effet est renforcé par l’impassibilité et le quasi mutisme du personnage interprété. Son unique réplique tiendra en trois mots : « I am palestinian ».
Trois, c’est également le nombre de segments composant le film pour autant de lieux visités successivement : Nazareth (le réalisateur y est né) puis Paris et enfin New York. It must be heaven se décline donc comme une sorte de triptyque dont la narration se montre fuyante. Si Suleiman dédie son film à la Palestine, It must be heaven ne fait de la cause palestinienne qu’un lointain prétexte.
Cette comédie dont la sortie dans les salles françaises est planifiée pour le 4 décembre 2019 joue plus sur un humour distancié qu’un humour noir et à vocation critique. Dès lors le film prend les reflets d’une fable divertissante parsemée de situations surréalistes. L’excellente scène d’ouverture est prometteuse mais très rapidement It must be heaven donne l’impression d’une succession de vignettes dont les plus drôles sont celles qui sont dialoguées. L’une de ces vignettes fait apparaître Gael García Bernal flanqué de Suleiman toujours aussi flegmatique et nonchalant. Mais comme le réalisateur-acteur reste le seul liant entre ces saynètes, l’ensemble peine à révéler un récit tenu de bout en bout.