Née à Versailles en 1932, Colette Dacheville, plus connue sous son pseudonyme de Stéphane Audran, est décédée le 27 mars 2018.
Audran apprend son métier auprès des comédiens Tania Balachova et Michel Vitold, avant d’être découverte par Claude Chabrol qui lui offre un petit rôle dans son second long métrage Les Cousins (1959).
Entre la jeune actrice et le cinéaste, c’est le coup de foudre. Après s’être séparée de Jean-Louis Trintignant, Audran épouse Chabrol en 1964 et devient son égérie. Jusqu’à leur séparation en 1980, l’actrice interprète pas moins de dix-sept rôles sous sa conduite !
Parmi eux, on retiendra celui de la corruptrice Frédérique des Biches (1968), de l’épouse traitresse et trahie de La Femme infidèle (1969), et de l’institutrice Hélène du Boucher (1970). Pour Chabrol, Audran a sans doute incarné un idéal physique tout autant que sociétal servant son discours critique à l’égard de la bourgeoisie française. Après Le Sang des autres (1984) et Poulet au vinaigre (1985), il faudra attendre le début des années quatre-vingt-dix pour que le couple se retrouve avec Jours tranquilles à Clichy (1990), Betty (1992), et L’Ivresse du pouvoir (2006).
Tout au long de sa carrière, Audran est apparue dans des productions réalisées par certains grands noms du cinéma français et international : Luis Bunuel (Le Charme discret de la bourgeoisie, 1972), Claude Sautet (Vincent, François, Paul … et les autres, 1974), Paul Kast (Le Soleil en face, 1980), Bertrand Tavernier (Coup de torchon, 1981), Samuel Fuller (Au-delà de la gloire, 1980), Claude Miller (Mortelle randonnée, 1983), ou encore Orson Welles avec l’inachevé The other side of the wind (1972).
Alors que la décennie quatre-vingt marquait pour l’actrice une baisse de régime, Le Festin de Babette (Gabriel Axel, 1987) lui permet de renouer avec le succès. Dans son Dictionnaire du cinéma consacré aux acteurs, Jean Tulard évoque à propos d’Audran un « charme acidulé » associant sécheresse, sensualité, dureté et vulnérabilité. La finesse de ses traits conférait à l’actrice une sorte de grâce aristocratique qu’amplifiaient encore l’emploi d’une gestuelle maniérée, ainsi que le choix de postures quelque peu hiératiques.
Ces spécificités stylistiques lui permirent de dépasser le carcan dramatique qu’avait indirectement imposé Chabrol à sa persona de comédienne. Non sans dérision, Audran avait su profiter de sa singularité pour détourner ses qualités de jeu auprès de rôles plus pathétiques (Coup de torchon), voire franchement caricaturaux (Paradis pour tous, Alain Jessua, 1982).
Ces différentes facettes firent d’elle l’une des comédiennes les plus attachantes du cinéma français.