Bébel, un homme qui nous plaît.
Interrogée par des micro-trottoir, la gente féminine n’était pas définitive.
« Il n’est pas beau beau mais il est pas mal ».
Bébel était certainement le plus beau des acteurs. Attachant, il crevait l’écran, il aimantait les regards. Il était le Magnifique.
Dans le cœur de chacun, il semblait ne toujours pas comprendre l’engouement, la sympathie communiante, l’envie de lui dire merci. Les rires qu’il a provoqués nous sont redevables d’une part de bonheur.
Il se confond presque avec la naissance de la télévision. Son premier film date de 1958, la RTF existe à peine. Tout le monde regardait la même chose à la télé. Les quinquas, les quadras, nous avons tous nos souvenirs.
Quand j’avais 10 ans, Bébel était mort. En 1981, il disparaissait sous le feu nourri des forces de l’ordre, il ne lui restait que quelques mètres pour rejoindre l’hélicoptère dans la dernière scène du film de Lautner. Il allait s’échapper. Le méchant c’était lui, mais tout le monde voulait qu’il gagne. Hargneux, boxeur, il avait la gagne au cœur. A moins que ce ne soit le contraire, à cœur de les gagner. A 10 ans, en 1981, Bébel mourrait sous mes yeux. A la fin du film, sous mon regard incrédule, il s’écroulait criblé de balles qui n’en finissaient de me faire dire : « Quel dommage ! » C’était le professionnel. Un professionnel n’est jamais qu’un amateur passionné. Et moi, je me disais que c’était dommage de ne plus le voir cet acteur professionnel. Celui qui ne croyait pas faire carrière dans le cinéma, celui qu’on est venu chercher dans la rue dans le quartier Saint Germain pour un court métrage réalisé par un réalisateur de la nouvelle vague réputé « peu fiable », celui qui voulait faire du Rugby amateur, de la boxe amateur, se confronter à l’art comme son père sculpteur était devenu un professionnel du 7ieme art.
Le météore
Le temps passe vite. Il joue avec la vie, frôle le danger sans peur. Les cascades accélèrent le rythme.
Ce 6 septembre 2021, on se ne souviendra peut-être pas du bolide qui a traversé le la voute céleste en France à minuit 15. Le fou de belle voiture, autre bolide, est lui monté au ciel , quand quelques heures avant, cet autre corps s’effritait en laissant une trainée lumineuse pour nous émerveiller. Il étincelait lui aussi. Pendant 40 ans, Bébel a trainé des rires et des larmes, laissant dans le ciel du 7ieme art, une trace unique. Un météore venu d’ailleurs, aussi rare que merveilleux.
Flic ou Voyou ?
La vie devait lui paraitre bien courte pour la jouer ainsi.
Qui c’est celui-là ?
Un Guignolo
Georges Génet visait juste.
A 100 à l’heure de bout en bout (d’un trapèze au dessus de Venise par exemple), il sourit, s’amuse, sans se prendre au sérieux. Il reste à distance de la politique. Il boude une carrière à Hollywood. Il n’apprend pas l’anglais. Un Guignolo, c’est Français avant tout.
Et puis « le cinéma est trop professionnalisé, trop segmenté ».
Mesrine, le voyou incontestable des années 70, écrit à Bébel depuis la prison de la santé pour lui proposer, qui sait, de faire un film sur lui. Mesrine s’échappe de prison quelques jours plus tard. Le rôle échappe à Bébel. Encore une pirouette !
Avec la presse, il s’échappe aussi. A contre-courant, il supprime les avant-premières,. Le public ne sera pas moins bien logé, ni juge plus passable. « Mes électeurs sont mes spectateurs ».
Au revoir.
Ce jour est triste.
Il va manquer. Annie Girardot le savait déjà. Lelouch et la musique de Francis Laï nous ont montré combien son absence peut laisser un vide. Il n’était pas descendu de l’avion dans le sublime film « un homme qui me plait » . Girardot, au firmament, nous a montré l’absence. Et c’est un vide immense.